Into the unknown | Ft. Mari

Vixen laisse des échos partout où elle passe. Une férocité qui se suit facilement et qui laisse des témoins, parfois même des articles de presse. Mais si Vixen n'est pas difficile à repérer, Mari McCabe l'est moins encore. Intérieurement, Dawn a remercié l'univers qu'elle soit de leur côté et non du genre à dévorer tous ceux qui pourraient la contrarier. Pas un autre adversaire de plus, mais une potentielle aide. Même si cette aide-là diffère grandement de celle qu'ils apportent au monde. Eux, Titans. Mais l'heure, semble-t-il, est au changement. Ils sont de plus en plus à choisir des moyens plus radicaux, plus brutaux pour lutter contre le crime qui gangrène leurs villes. Même si elle n'apprécie pas cette idée, elle doit le reconnaître. Ils ont besoin de toute l'aide possible. Ils ont besoin de brutalité. Ils ont peut-être besoin de changer.

Elle s'est donc retrouvée le soir, le profil éclairé par la lumière bleue de son ordinateur. À soupirer, consciente d'être dépassée sur tous les plans de sa vie. Et à se dire qu'ils ont besoin d'elle, de Vixen. Qu'ils ont besoin qu'elle soit officiellement de leur côté. Et qu'elle a sans doute besoin d'eux, elle aussi. Dawn sait, trop bien, à quel point cela peut être dur de lutter seule.

Plus tard encore, c'est dans un hall immense qu'elle s'est retrouvée. Le siège de la marque de McCabe a des airs d'empire. Dawn y fait claquer des talons aiguilles et traîner son habituel trench coat gris. Elle réclame à voir Mari, on le lui refuse. Elle dit qu'elle ne partira pas avant de l'avoir vu, ou au moins, avant qu'elle n'ait été mise au courant de sa venue. Elle annonce un autre prénom que le sien, Dove. Parce que c'est elle qui est connue, bien plus que Dawn. On consent finalement à la laisser monter et dans l'ascenseur, elle continue de se demander ce qu'elle fait là. Pour qui elle se prend. Comment la convaincre, lui montrer l'intérêt qu'il y a à travailler en équipe quand elle-même l'oublie parfois. Les portes s'ouvrent et les disparaissent. Elle trouvera les réponses plus tard.

Arrivée devant le bureau de la jeune femme, Dawn prend une grande inspiration et entre lorsqu'on le lui permet. La présence de la zambézienne est imposante, elle doit le reconnaître.

- Bonjour et merci de me recevoir.

C'est un début qui lui semblait approprié.

- Je suis Dawn Granger. Dove, des Titans.

La situation la fait sourire, c'est un étrange entretien professionnel, s'il en est.

- Et je voudrais vous parler de Vixen, si vous le permettez.

Elle a conscience que ses chances de réussite sont faibles. Mais elle ne croit pas en les probabilités.

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Wind wind howling in my face, tearing up the asphalt. I'ma getting up in the place. Run, run no where left to hide. I must take a stand now, find the strength inside. Welcome to the vortex, absolute ground zero of my heart, pinnacle of the apex. Nothing's gonna tear my soul apart. --  feat. @Dawn Granger

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Ce n'est pas son monde. Celui des affaires, des grands bureaux, des Powerpoint et des lumières blanches. Dawn n'a connu des lumières que celles que l'on projetait sur les parquets lustrés des scènes d'opéra, des salles de danse. Et ces lumières sont bien loin, désormais. Depuis des années, c'est dans l'ombre qu'elle se terre. Les entrepôts désaffectés, les ruelles sombres. Elle a conservé la grâce et le port de tête d'une ballerine, mais ne vaut pas mieux que n'importe quelle brute qui se bat en contrebas. Et elle est épuisée de lutter, épuisée.

- Oh j'adorerais être venue pour discuter de maquillage, tu peux en être sûre.

Vixen ne souhaite pas qu'elle s'embarrasse de convenances, Dawn s’exécute. Elle n'est elle-même pas grande amatrice des faux semblants et des politesses qui enrobent bien souvent des vérités plus laides. Elle a conscience de ne pas être tout à fait la bienvenue ici, le comprend tout à fait. Elles ne se connaissent pas, ne s'estiment pas, et les attaques dont Vixen a été la cible sont souvent venues des super-héros eux-mêmes. Elle a toutes les raisons de se méfier. Dawn ne désespère pourtant pas et ne cille pas une seconde. Elle s'assoit lorsqu'on l'invite à le faire et déclare ses intentions très calmement.

- Je voudrais que tu rejoignes les Titans.

Et elle formule cette demande au nom d'elle-même, pas de son équipe. Parce que son équipe n'est de toute manière que bien trop morcelée pour formuler quoi que ce soit. Elle en a parlé à Hank, bien sûr, qui s'est contenté de lui marmonner qu'ils n'avaient pas besoin de plus d'aide mais de changer d'approche. Et venir chercher l'aide de Mari, c'est déjà changer d'approche.

- Je me doute que tu ne dois pas nous tenir en haute estime.

Les Titans ont échoué, aux yeux de tous. Et à raison. Ils ont échoué mais ont continué de lutter, s'acharnent toujours de le faire aujourd'hui. Et aux yeux de Dawn, c'est bien tout ce qui compte.

- Nous avons échoué et essuyé de très douloureuses pertes, c'est vrai.

Le visage de la blonde se ferme légèrement lorsqu'elle pense, inévitablement, à Jason. Mais il y a aussi tous ceux qui peu à peu, s'éloignent de leur objectif commun. Elle la première.

- Mais nous restons une équipe, et nous continuons de lutter.

Dawn fait tourner les quelques bagues argentées autour de ses doigts, pensive. Elle en veut souvent au monde pour avoir oublié dès le retour de la Justice League qu'ils ont essayé. Qu'ils étaient là pour ceux qui restaient en bas quand les grands héros avaient disparus, embourbés dans leur espoir d'anéantir de grandes menaces.

- Et en échange de ton aide, nous pourrions t'apporter une famille.

Relativement préparée à ce que Mari lui rit au nez, Granger espère tout de même ne pas lui paraitre trop ridicule, trop naïve. Naïve, elle ne l'est plus. Et chaque mot qu'elle prononce, elle les sait vrais.

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De la perplexité puis de l'hilarité, bien. Dawn ne s'en offusque pas, elle préfère ça à l'indifférence crasse qui n’apporte jamais rien. Mari est perplexe mais largement assez intelligente pour comprendre où elle veut en venir. Et largement assez intelligente pour se demander si les règles ont changées ou si on va lui demander à elle de changer. Une question qui se pose et à laquelle Dawn mentirait si elle réclamait avoir la réponse. Les Titans, comme toute bonne équipe de super-héros, ont été construits autour de règles précises. Règles inspirées de celles de Batman avant la tragédie qui leur ont enlevé le justicier, et jamais vraiment rendu. Ne jamais franchir les limites de la loi, ou c'est Arkham ou tout autre asile de fous qui les accueillera. Et ils ont suivi cette règle, une limite imposée à eux-mêmes. Pour être sûrs qu'ils ne deviendront jamais ceux qu'ils combattent.

Et malheureusement, les règles ont changés.

Ou sont en train de le faire, du moins. Beaucoup d'entre eux sont fatigués et surtout dépassés par une criminalité qui ne cesse d'augmenter, y compris dans des rangs où elle ne devrait surtout pas se trouver. Dawn elle-même est épuisée de ses quelques allers-retours au commissariat de Gotham où les dossiers disparaissent au gré des valises de billets qui circulent entre des agents sous serments et des criminels de haute volée. Alors oui, elle se pose des questions.

- Que tu considères l'idée au moins, oui.

Dawn garde son calme et son sérieux, précisant qu'elle n'attend pas une réponse définitive aujourd'hui. Elle a entièrement, parfaitement, totalement conscience qu'il est tout à fait ridicule de préciser une telle chose alors qu'elle semblait déjà assez évidente. Elle le fait tout de même puisqu'elle n'a, à vrai dire, pas grand chose d'autre à déclarer et parce qu'elle a, à vrai dire, aucune envie de faire machine arrière.

- Ah non, je ne me permettrais jamais. Lex Luthor et l'huile de palme sont deux engeances démoniaques qu'il nous faut combattre.

Elle opte donc pour l'humour en deuxième recours, sans laisser tomber son sérieux à toute épreuve puisqu'après tout, il s'agit de la difficile vérité. Pour le reste, Dawn n'a plus à prétendre puisque le sujet devient trop grave pour l'ironiser. Elle hausse les épaules, une moue un peu triste sur le visage.

- C'est ce qu'on dit, ouais. Mais en vérité avoir une famille, c'est un peu la came de tout le monde. Je sais qu'on raconte que c'est pour être plus forts que les super-héros se réunissent, c'est vrai. Mais c'est aussi pour être moins seuls. Parce qu'on se bat, on perd souvent. Et quand on perd, on a besoin de quelqu'un pour nous décoller du sol sur lequel on vient de s'écraser.

Ce n'était pas son truc, à elle non plus. Elle a mis du temps à faire confiance à Hank et collaborer avec d'autres a mis en péril le frêle équilibre qu'ils ont su trouver. Elle ne regrette rien, pourtant.

- Et les règles changent.

Dawn jette un coup d’œil à la jeune femme, incertain et surtout dangereux. Les siennes sont sur le point de le faire, du moins. Elle le croit. Elle s'est déjà surprise à être plus brutale sur le champ de bataille, à jouer moins sur la défensive et bien trop en attaque, quand elle n'est pas taillée pour ça. Sa gentillesse et son indulgence sont en train de pourrir en elle comme de la viande laissée au soleil. Si elle ne fait rien, maintenant, ce sera un carnage.

- Je suis désolée que tu aies eu à voir tout ça.

Il faut bien commencer quelque part, après tout. Et sa nature profonde n'a pas encore changé.

- Je ne pense pas que nous n'avons jamais été préparés à combattre la démence des hommes. Nous avons essayé de conserver un cadre pour ne jamais devenir comme eux. Nous avons sauvé, limité les dégâts, puisqu'il n'était jamais vraiment question de punir mais plutôt de faire échouer. Nous avons fait échouer une grande quantité de criminels, menaces surnaturelles.

Ce n'est pas tant pour Mari qu'elle parle, le regard dans le vague. Elle répète ce qu'elle a envie de croire, pour elle. Elle en a besoin. Besoin de se dire que ce n'était pas inutile, tout ça.

- Aujourd'hui, les proportions de ces crimes, menaces, nous dépassent clairement.

Elle rit, sans joie, et reporte son regard sur Mari. Elle ne sent aucun jugement dans ses yeux, aucune fierté d'avoir eu raison. Rien que de l'empathie et une certaine tristesse, ce qui la pousse à croire qu'elle fait le bon choix.

- Je suis dépassée.

Qu'elle avoue, curieusement décidée à l'admettre devant elle.

- Et je pense, c'est vrai, que tu pourrais beaucoup nous apporter.

Si ce n'est pas en tant que membre régulier, au moins en tant qu'aide ponctuelle. Ils ont besoin de sa force, brutale mais maitrisée. Rien de comparable avec ce que son acolyte a à offrir, prêt à brûler le monde entier si personne ne l'arrête. Elle voit en Vixen l'héroïne qu'elle est mais aussi, une certaine sagesse. Celle de ceux qui en ont trop vu. Et surtout une volonté implacable dont ils ont besoin en ces temps troubles, ou personne ne sait plus où aller et encore moins quoi faire.

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Elle ne pensait pas sérieusement parvenir à la convaincre. C'est peut-être ce qui lui a donné le courage de venir, finalement. La certitude qu'elle rentrerait bredouille, satisfaite d'avoir au moins essayé et de ne pouvoir avoir de regrets. Et au lieu d'hésiter, elle s'est trouvée d'autres évidences à mettre en avant. D'autres nécessités qu'elle n'imaginait pas si vives, si brûlantes. Elle s'est trouvée plus déterminée que prévu à apprendre de Mari et à l'intégrer à leur équipe, imparfaite et disparate, peu importe les différences d'opinions de chacun. Et elle se dit, naïvement, que si elle a été capable de convaincre elle... alors sans doute qu'elle saura convaincre les autres.

Et cette conversation la fatigue, parce qu'elle la met face à tout ce qu'elle fuit. Dawn finit par lui sourire tristement et ce sourire ne monte pas jusqu'à ses yeux. Le regard qui traine sur Vixen avant de se poser sur sa main et la chevalière qu'elle porte, triturée autour de son doigt depuis quelques minutes déjà.

- C'est vrai.

Elle n'est pas là pour se plaindre. Parce que Mari n'a pas tant de temps à lui accorder pour la périlleuse mission qu'elle s'est confiée, encore moins pour ses états d'âme. Mais il lui semble aussi que si elles en sont là, à parler si sérieusement, c'est aussi parce qu'elles se comprennent un peu. Des méthodes radicalement différentes mais un but commun. C'est sur ce but commun qu'elle a besoin de se concentrer. Parce qu'aujourd'hui, elle ne sait plus où regarder.

- Je n'aurais jamais cru que ça irait aussi loin, tu sais. Qu'on perdrait Jason, puis Raven. Qu'on perdrait la guerre et que tout changerait si fort. Je ne pensais pas qu'ils iraient si loin et aujourd'hui j'ai l'impression de ne plus jouer dans la même cour qu'eux. C'est vrai.

Eux, ceux qui sont mauvais, qui sévissent sans s'arrêter et qu'elle ne veut pas comprendre. Granger sert les dents, inconsciemment. Elle fait ça tout le temps.

- Merci de m'avoir écouté.

Son regard retrouve celui de Mari, à qui elle sourit. Plus sincèrement cette fois.

- Je vais en parler aux autres et leur dire que tu es prête à travailler avec nous. Ça prendra du temps avant qu'on ne réussisse à réunir tout le monde et à coopérer ensemble... mais je pense qu'on peut y arriver.

Dove se lève et avise une nouvelle fois Vixen. Un peu moins d'une minute, assez longtemps pour tenter d'imprimer ce visage dans sa mémoire et se convaincre qu'elle est prête à se battre avec elle. Qu'elle peut apporter toute la paix dont on besoin ceux qui n'ont jamais connu que la guerre, et qu'ils peuvent lui donner la force de se battre.

- De notre côté, on t'apprendra peut-être qu'il y a tout de même un peu de vertu à récupérer au coin des rues.

Deux pas en arrière et un sourire au coin des lèvres, Dawn hausse les épaules. Le monde change mais elle, pas tellement.

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