Liberté, un mot qui prenait tout son sens lorsque l’on s’en retrouvait privé. Un sentiment qui faisait sens qu’une fois le Gabon devenu une étendue d’une verdure infernale que Barbara avait pu quitter après deux longues années d’enfermement. Qu’elle avait pu hurler à plein poumons moults sentiments. Qu’elle avait pu user du peu de forces qu’elle avait pour frapper ce sol sur lequel elle s’était tenue, sur ces murs entre lesquels elle avait existé. A présent elle n’avait plus à compter les marques de griffes laissées dans la pierre à chaque mois écoulé, elle pouvait se déplacer où elle le souhaitait et quand elle le souhaitait, nul besoin d’attendre que ses géôliers daignent lui faire réaliser l’une de ses rares sorties à l’air libre. Elle était chez elle à présent, sur les terres des Cavendish et elle n’avait plus à souffrir du contrôle du guépard car ils n’étaient plus qu’une seule et même entité. Seule aux commandes, plus de réveils couverte de sang sans disposer du moindre souvenir… Un sentiment relativement apaisant qu’elle savourât pleinement à chaque instant depuis son retour sur le sol britannique. Plus de migraines. Plus de faiblesse affligeante et de canne. Juste elle, Barbara Minerva.

Lorsqu’elle avait quitté le manoir, elle s’était rendu compte que l’air était chargé d’électricité et laissait présager que la pluie surviendrait dans l’heure suivante, accompagnée de la forte probabilité d’un orage. Un fait qui se réalisa bien alors qu’elle s’était mise à parcourir cette forêt dans laquelle elle s’était régulièrement promenée dans sa jeunesse et qu’elle parcourait à nouveau sous la forme de Cheetah depuis son retour. La terre meuble s’était rapidement gorgée de cette eau qui coulait à travers le manteau de feuille formé par les arbres et il n’avait pas fallu bien longtemps avant que cette eau ne vienne tremper le pelage qui recouvrait la peau de la femme-guépard. Le mauvais qui faisait rage n'arrêta pas un seul instinct l’instinct de prédation qui animait chacun de ses muscles, à la poursuite d’une proie qui viendrait apaiser cette faim qu’elle ressentait. La piste ne fut pas aisée à suivre, la pluie emportant avec elle les odeurs ambiantes mais surtout celle en particulier de ce cerf qui se trouvait dans les parages. Elle devait se concentrer sur son objectif, tout en n’oubliant pas cet arbre marqué au pied duquel elle avait caché un manteau dans un sac plastique pour le retour.

Plusieurs minutes lui furent nécessaires avant d’avoir en vue ce cerf qu’elle pourchassait et plusieurs autres minutes supplémentaires durent s’écouler avant qu’elle ne vienne ôter la vie à la créature pour s’en nourrir. La lutte n’avait duré que quelques instants, suffisamment pour que l’animal émette un cri qui vienne forcer un silence des plus total sur cette forêt. Barbara n’eut cependant pas suffisamment de temps pour se repère entièrement de sa proie car aussi discret essayait-on d’être, des bruits de pas lui parvinrent. Il fallait qu’elle reste discrète, assez longtemps pour reprendre ses forces et ne pas attirer dans l’immédiat l’attention de Wonder Woman. Délaissant la carcasse grandement lacérée, elle bondit dans les fourrés et s’attela à s’écarter le plus possible de la personne qui se rapprochait. Il fit un détour qui lui fit perdre beaucoup de temps mais au moins elle ne serait pas vu par des yeux indiscrets et ne serait ainsi pas obligée de s’en débarrasser. Elle finit par retrouver l’arbre marqué puis elle entama cette transformation qui lui permettrait de retrouver son apparence humaine. Occupée par ce changement d’apparence elle ne remarqua pas l’homme qui se tenait à quelques mètres d’elle et qui l’observait passer de femme-guépard à simple femme aussi nue qu’un nouveau-né, ce ne fut pas avant qu’elle ne cherche à sortir le manteau du sac qu’elle se figea enfin pleinement consciente de l’intru.

- Vous êtes sur une propriété privée sur laquelle vous ne pouvez chasser le renard qui vient de passer, déclara-t-elle avant d’enfiler le manteau et de se relever pour se tourner vers l’inconnu. A dire vrai, elle était encore un peu loin de la parcelle lui appartenant mais rares étaient ceux qui connaissaient les limites des terrains. Bluffer était dans l’immédiat la première solution qui lui était parvenue. Et éteignez-moi cette cigarette, ces saloperies mettent deux ans à se décomposer dans la nature.

Le manteau dans les mains, elle s’était figée alors qu’elle venait de prendre pleinement conscience que si elle avait échappé à la vue de l’inconnu plusieurs minutes auparavant elle n’avait pu se soustraire à au regard d’un autre. Il était là, à quelques mètres à peine d’elle, et il ne bougeait pas d’un cil. S’il était doué d’un instinct de survie fonctionnel il aurait déjà pris ses jambes à son cou et pourtant il restait là avec son terrible agent destructeur coincé entre ses lèvres, se consumant sans son aide il semblait surpris par ce qu’il venait de voir.

Plus alerte que lui, elle fut la première à prendre la parole. Bluffer était une solution comme une autre si toutefois le brun qui se tenait en face d’elle n’était pas un habitué des lieux et des lois et alors qu’elle enfilait le manteau pour se couvrir, elle ne décrocha pas un instant son regard de l’inconnu afin de pouvoir observer ses réactions. Heureusement pour elle, le renard derrière était encore suffisamment visible pour corroborer ses paroles et la petite créature rousse attira le regard de l’homme qui ne mit qu’un instant que l’amusement ne vienne étirer ses fines lèvres.

Il n’avait pas souvenir. Soit il le savait et assister à la transformation avait totalement perturbé son esprit. Soit il était un habitué de la forêt et ne s’y était pas rendu depuis plusieurs années. Dans tous les cas il ne semblait pas mentir, si elle ne pouvait sentir l’odeur du mensonge à cause de la pluie, il n’y avait pas les habituels tics liés au mensonges. Elle ne répondit rien sur le moment mais lorsqu’il reprit la parole, elle ne pu s’empêcher de le regarder de bas en haut, haussant un sourcil avant de finalement lui adresser un demi-sourire.

- Il existe différents types de chasseurs et les armes ne sont pas toujours nécessaires. Et puis au fond, nous sommes tous des chasseurs, répondit-elle avant de lui demander d’éteindre sa cigarette, son sourire s’effaçant quelque peu. Non seulement les mégots ne constituaient pas la plus écologique des créations mais l’odeur lui était fortement désagréable, alors s’il concédait à l’écouter elle serait bien plus ouverte à discuter avec lui. Il s’exécuta sans attendre une nouvelle remarque et la remercia avant qu’un quinte de toux ne vienne s’emparer de lui. Il lui fallut plusieurs secondes avant qu’il ne puisse reprendre le contrôle de lui-même, la regardant à nouveau, et de poursuivre.

Plongeant ses mains dans les poches de son manteau elle se rapprocha de lui alors qu’il venait aborder ce qu’il venait de se produire, confirmant qu’il se sentait suffisamment sain d’esprit pour croire ce qu’il voyait. Qu’allait-elle bien pouvoir faire de lui ?

- Chaque forêt un tant soit peu aussi étendue que celle-ci à sa propre légende, ses petites histoires contées par des chasseurs trop esclaves de l’alcool ou encore par des enfants qui cherchent à faire peur. Vous n’auriez pas été témoin de ma transformation tout cela serait resté une simple histoire racontée à un comptoir ! Quant à ce que je suis… C’est une longue histoire, répondit-elle sans décrocher son regard du sien.

Comment réagirait-il à ses paroles ? A quel point voudrait-il connaître ce qu’elle était ? La curiosité était bonne lorsque toutefois elle ne m’était pas en danger. Elle avait imperceptiblement penché la tête sur le côté, tout aussi curieuse que l’inconnu, elle avait senti ses sourcils se froncer alors qu’il prononçait un nom qui ne lui était pas inconnu et qui sortait tout droit du passé. Un Constantine et en plus de cela il se déclarait détective du paranormal. Une occupation qui prêterait à sourire si toutefois les hommes destructeurs venu de l’espaces et les Amazones telles que Wonder Woman n’existaient pas. Elle s’apprêta à lui répondre mais le ciel se déchaînait au-dessus de leur tête, la pluie s’abattait avec force et l’ordre grondait.

- Venez chez moi, ce n’est qu’à quelques centaines de mètres d’ici. Je ne voudrais pas que le froid ne vienne mettre à l’épreuve ces poumons d’ores et déjà fragilisés, dit-elle avant de l’inviter à la suivre d’un mouvement de tête et de le guider jusqu’à la demeure familiale qu’elle occupait avec un nombre restreint de domestique. Une fois arrivés sur place ils furent débarrassés de leur manteau trempé et ce ne fut que lorsqu’elle fut vêtue d’une robe de chambre qu’elle s’adressa de nouveau à lui. Je croyais que tous les Constantine étaient morts dans un incendie. Mes condoléances pour votre père… Thomas c’est bien ça ? Je n’ai que rarement pu avoir l’occasion de l’apercevoir lorsqu’il venait traiter avec lord Cavendish mais je crois que Père avait une bonne estime de lui… Un thé peut-être ?

Si la magie avait été à l’œuvre dans le rituel afin de devenir Cheetah, il n’en restait pas moins que Barbara n’avait été que peu confrontée à cette part si particulière du monde qu’était la magie ou encore des sciences occultes. Cela restait un véritable mystère très souvent représenté dans la culture et si elle se doutait qu’elle devait se méfier des capacités que pouvait lui cacher ce détective de l’occulte, elle ne pouvait éteindre cette flamme de curiosité nourie malgré elle à l’encontre du dénommé John Constantine. Traquait-il aussi bien les vrais satanistes que les faux qui lisaient la première formule trovuée sur internet et qui découvraient avec surprise qu’elle était un peu trop réelle ? Des fantômes étaient-ils coincés sur Terre et devait-il s’occuper de ceux qui intéragissaient avec l’espèce humaine ? Tant de question qui se bousculaient dans sa tête qu’elle s’était rapprochée de lui, les mains dans les poches. Un léger sourire vint étirer à nouveau ses lèvres alors qu’il venait d’ironiser sur ses précédentes paroles. Pour sûr qu’elle s’y connaissait en matière de chasse, aussi bien lorsqu’elle était enfant et qu’elle avait apprit la chasse auprès de son père, que lorsqu’elle était devenue ce qu’elle était désormais.

Ausssi malade pouvait-il être, il était alerte et ne manquait pas d’esprit. Deux points qui étaient loin de donner envie d’abréger les souffrances du brun. Lorsqu’elle lui proposa de venir se réfugier jusqu’en sa demeure, elle s’était attendue à essuyer un refus : après tout on ne suivait pas les inconnus n’importe où, encore moins lorsque ses derniers venaient de faire preuve d’habilités fort peu communes. Pourtant il parut plus soulagé de ne plus se trouver sous la  pluie glaciale qu’inquiet de ce qu’elle pouvait faire dans l’intimité de sa propriété. Confiant de ses capacités ou tout simplement inconscient ? Impossible de répondre à cette question alors qu’elle ne savait pas quel genre d’homme il était. Ce ne fut qu’une fois entrés ans la demeure, débarassés de leurs affaires mouillées et désormais vêtue d’une robe de chambre que Barabra s’adressa à nouveau à Constantine. La mort de Thomas Constantine n’avait pas échappé à lord son père et nul n’aurait cru que son fils ait pu survivre à un tel incendie, pourtant les faits étaient là. Être le seul survivant, qu’elle place inconfortable surtout pour l’enfant qu’il avait été à l’époque et elle ne pouvait imaginer ce qu’il avait pu vivre les mois qui avaient suivis.

- Il semble qu’avoir travaillé pour lord mon père ait été bien plus gratifiant que d’être de sa propre famille… murmura-t-elle avant de capturer le regard de Constatine qui semblait chercher quelque chose. Plissant légèrement les yeux, elle suivit son regard sans toutefois pouvoir déterminer l’objet de cette recherche. Un léger soupir quittant sa bouche, elle activa le petit bouton à l’entrée du salon puis poursuivit son chemin, invitant le détective à s’asseoir sur l’un des fauteuils près de la cheminée, au-dessus de laquelle se trouvait le portrait de ses parents. Vous avez de la chance d’être tombé sur moi aujourd’hu et non pas il y a quelques années, vous auriez servit de dessert ! Mais dites-moi, est-ce votre travail qui vous a mené dans cette forêt ou tout simplement le hasard a fait que nos chemins se sont croisés ?

Les cuisines prévenues de leur présence, ils n’avaient plus qu’à confortablement s’installer sur les fauteuils du grand salon et commencer à discuter de certains points. S’il ne faisait aucun doute que le dénommé Constantine chercherait à obtenir des réponses sur la nature qui était celle de Barbara, elle n’était de son côté pas en reste. Il avait éveillé sa curiosité lorsqu’il s’était présenté comme un enquêteur du paranormal et elle ne comptait rester sur un « entre autres » pour seule information sur l’étendue de ce rayon d’action sur lequel il pouvait intervenir. S’enfonçant dans son fauteuil, elle ne se rendit pas compte sur le moment que son murmure avait été entendu par le détective et elle ne le constata que lorsque l’homme réagit à ses propos avec une politesse louable dont ne transparaissait pas le moindre mensonge. Thomas Constantine avait donc été fier de travailler pour lord Cavendish. Elle hocha légèrement la tête sans toutefois réagir au propos émis, son père s’était assombrit à la suite de la mort de son épouse et si au moins un être sur cette Terre avait pu l’apprécier alors il n’avait probablement pas été totalement perdu. Une sourire vint cette fois étirer ses lèvres.

Quelques années auparavant, Cheetah n’aurait pas reprit forme humaine avec la présence d’un humain aussi proche d’elle. Elle n’aurait pris le risque de s’exposer ainsi à une quelconque attaque alors que Barbara souffrait un peu plus à chaque transformations. Quelques années auparavant, Cheetah n’aurait pas hésité un seul instant à dévorer John Constantine aussi puissant pouvait-il être ou du moins elle aurait tout hésité pour. La Barbara de l’époque n’aurait pas fait long feu. Sans se départir de son sourire, elle se remit à observer le brun tout en commençant à jouer avec une mèche de cheveux.

- Je n’en doute pas un seul instant, réagit-elle avant de laisser reposer son bras sur l’accoudoir à l’instant où entrait l’un de ses domestiques, munis d’un plateau qu’il vint poser sur un meuble non loin d’eux pour servir le thé dans chaque tasse avant de discrètement venir les servir. Elle ignorait de quoi était capable John Constantine, elle se devait donc de conserver un brin de méfiance tant qu’elle n’aurait pas toutes les informations qui lui serraient utiles en cas de besoin et pourtant elle ne pouvait s’empêcher d’imaginer ce à quoi pourrait ressembler un affrontement entre eux deux.

Levant sa tasse pour venir inspirer profondément cette odeur de thé noir citronné tandis que les traits de son visage devenaient sérieux, elle l’écouta répondre à sa précédente question. Il était donc venu pour le travail et elle avait manqué de discrétion au point que des témoins de plus ou moins fugaces visions de sa silhouette et de ses trophées avaient fait appel à lui. Un marché. Elle devait lui dire ce qu’elle était et il en ferait autant. Il répondrait à ses questions et déciderait ensuite quoi faire d’elle. Elle haussa un sourcil. Osait-il insinuer qu’il serait prêt à la tuer sur-le-champ en sa demeure ? Sans prononcer un mot, elle souffla légèrement sur son thé et en prit une gorgée tandis qu’il lui laissait le loisir de commencer.

- La mythologie me passionne depuis mes jeunes années et devenir archéologue m’a permise de partir à la recherche de tombeaux aussi bien inconnus que perdus. Qu’est-ce que cela à voir avec votre question ? C’est ce qui m’a menée après des déboires à accepter une recherche qui in fine a changé ce que j’étais. Êtes-vous familier avec le Bwunda ? Elle reprit une nouvelle gorgée de thé et n’attendant pas réellement de réponse de la part de son invité, elle reprit. La jungle de ce pays renfermait le mystère de la cité perdue des Urzkartagan et je l’ai percé. Il y a eu une attaque et lorsque la Mort s’est présentée à moi, l’instinct de survie a pris le pas et le prêtre de cette tribu m’a permise de survivre, de devenir l’avatar du dieu Urzkartaga. Avait-il besoin de savoir que les années qui ont suivit l’avaient vu s’affaiblir à chaque pleine lune ? Qu’il lui avait fallut retourner sur les terres Urzkartagan, être emprisonnée et recevoir une aide mystérieuse pour ne plus être l’esclave du dieu ? Non, il n’avait pas besoin de le savoir. Et vous John ? Vous êtes plus qu’un simple détective, n’est-ce pas ?

Une rencontre quelques années plus tôt et elle aurait connu une fin rapide, probablement douloureuse. Barbara n'en doutait pas un seul instant et elle ignorait encore l'étendue des capacités de John Constantine. Désirait-elle le découvrir ? A n'en point douter mais pas à ses dépends, non. Sa demeure était-elle peuplée d'êtres morts depuis des années ? Si tel était le cas, les sentaient-elle grâce à ses capacités ? Une question fort intéressante qui méritait réflexion et surtout expériences mais le sujet déviant sur la curiosité de Constantine à son encontre, elle ne pu que se concentrer, soufflant légèrement sur son thé avant d'en boire une gorgée. Passé la menace à peine voilée, elle se délecta un instant du goût du thé sur sa langue avant de répondre à la question du brun.

Répondre était nécessaire pour qu'en retour elle puisse le questionner. Songer à mentir ? Une erreur qui pouvait lui coûter cher. Pour autant, devait-il savoir par quelle extrémité elle avait dû passer pour devenir Cheetah ? Ce qu'il était advenu des assaillants ? De cet incessant désir de consommer de la chair humaine ? Il n'était pas nécessaire de le lui dire ou du moins pas sur le moment, elle aussi ignorait quoi faire de lui bien que d'être menacée en son domaine ne lui donnait guère envie de le laisser repartir sans dommages. Alors qu'elle lui répondait, son regard oscillait entre les vaperoles de fumée s'échappant de sa tasse et des réactions que pouvait laisser échapper ce détective à l'occupation fort peu commune. Histoire suprenante. La conclusion prononcée flotta dans l'esprit de Barbara qui lui retourna la question, après tout il lui devait aussi une réponse.

Siroptant une nouvelle gorgée, elle reposa délicatement sa tasse sur sa soucoupe et la déposa non loin d'elle avant de se pencher légèrement en avant alors qu'il prenait la parole. Il était un détective du paranormal, un titre grandement vague sans la moindre précision apportée mais voilà que les informations intrigantes lui parvenaient. Un exorciste. Non affilié à l'Eglise. Pas de grande entente à en croire ce qu'elle entendait. Et le paranormal s'était imposé dans sa vie. Imposé... un mot qui semblait soigneusement choisit pour décrire sa situation. Elle détailla à nouveau du regard puis se renfonça dans son fauteuil alors qu'il la questionnait sur le Bwunda.

- Principalement recouvert d'une jungle relativement peu accueillante, destination intéressante uniquement si vous partez à la recherche d'une cité perdue et que vous découvrez une plante... magique, dit-elle, instistant volontairement sur le dernier mot, lui adressant un clin d'oeil. Le paranormal s'est imposé à vous, vous ne l'avez pas recherché en premier lieu. A moins que vous étiez un pyromane enfant ou qu'il se soit agit d'un simple accident, cela a-t-il quelque chose à voir avec la mort de vos parents ? Théorie probablement farfelue alors que Barbara ne connaissait rien de la vie de John Constantine mais qui pour autant ne lui semblait pas totalement dénuée de sens. Après tout, que risquait-elle à emettre une mauvaise supposition ?

Le Bwunda n’était pas une destination privilégiée pour les activités touristiques. Non, loin de là. L’insécurité y régnait en parfaite maîtresse et ce n’était pas le gouvernement brutal et corrompu du général Mbarra, affrontant depuis des années le Front Populaire national du Bwundan, qui pouvait arranger la situation des habitants. Seule son épaisse jungle peuplée d’une faune aussi magnifique que dangereuse, était relativement épargnée par la violence tumultueuse…. Enfin pas les deux seules fois où elle s’y était rendue. La Barbara insouciante qu’elle avait été s’était émerveillée de la découverte de cette cité aussi majestueuse que mystérieuse. Mais il avait fallu que tout déraille, que sa soif de pouvoir et de survie lui fasse commettre l’irréparable. Tout cela s’était soldé par des années de souffrance, des mois d’emprisonnement avant qu’elle ne soit enfin libérée de l’influence de la lune et qu’elle soit ici présente, en cet instant. Bon il lui restait encore à se soustraire de l’autorité que Urzkartaga pouvait avoir sur elle mais il s’agissait là d’un point fort peu important face à la volonté d’affronter à nouveau l’Amazone et d’enfin prendre le dessus sur elle.

Passés les souvenirs de cet enfer vert, l’esprit félin de Barbara se concentrait déjà sur un autre sujet : les pouvoirs de Constantine. Ses parents étaient morts dans l’incendie de leur lieu de vie, leur fils en avait été le seul survivant et ses pouvoirs lui étaient comme « tombés » dessus. Il y avait peut-être bien un lien qui expliquait ainsi la raison de sa disparition des radars. La question sembla le déstabiliser, signe qu’elle ne devait pas être loin de la vérité alors qu’il ne s’agissait que d’une supposition fabriquée avec le peu d’informations communiquées. Ce qu’il était à ce jour découlait de la nuit où ses parents avaient trouvé la mort. Intéressant. Qu’avait-il fait ? Etait-ce lui la cause de l’incendie ? Elle hocha silencieusement la tête avant de reprendre une gorgée de thé tandis que la curiosité du brun s’exprimait à nouveau. La fonction d’Urzkartaga…

-Je dirais qu’il contrôle la forêt. Enfin ça reste un dieu-plante assoiffé de sang, puissant et sans âge qui aime que des vierges lui dévouent leur vie en accomplissant son rituel. Qui bénit autant qu’il peut maudire… Je me demande ce que vos pouvoirs vaudraient face aux siens… enfin aux siens et aux miens car je pense qu’il me convoquerait à son côté, répondit-elle songeuse avant de lui adresser un sourire. Non pas que j'éprouve un irrépressible besoin de le découvrir, disons qu'il s'agit d'une curiosité scientifique !

Il était curieux à son sujet comme elle l’était tout autant à son sujet. La curiosité était le comburant permettant d’emmagasiner du savoir, d’ouvrir son esprit, et s’il s’agissait d’une qualité reconnue il s’agissait tout autant d’un grand défaut qui pouvait tout à fait se retourner contre soi. En cet instant c’était ce qui leur faisait se jauger à travers une succession de questions et qui les tenaient éloignés d’un sanglant affrontement qui verrait l’un des deux subir d’importante séquelles si ce n’était trouver la mort. Une issue qu’il serait à la fois intéressant à connaître tout comme il n’était que peu engageant de savoir qu’il était possible que ce soit elle qui trouve la mort.

Elle continua à boire son thé par petites gorgées tandis que Constantine réagissait à ses propos. Cacher son jeu, pour sûr et elle avait l’impression que c’était ce qu’il faisait en cet instant. Des alliés improbables ? Qui étaient-ils donc ? Quelles étaient leur capacités ? Il lui faudrait assurément se renseigner plus en détail sur ce qui parcourait ce bas monde outré les divinités et les héros au visage masqué. S’allierait-il potentiellement à Wonder Woman ? Il n’avait pas intérêt à s’approcher de l’Amazone.

Lorsqu’il lui révéla avoir une question à lui poser, à l’importance trahie par le ton employé par l’enquêteur du paranormal, Barbara se pencha légèrement en avant. Son attention était une nouvelle fois piquée. Quelle serait cette fameuse question posée par cet homme curieux, observateur à n’en point douter ? Il avait les traits tirés par le sérieux de ce qui se déroulait dans son esprit et son regard ne décrochait pas le sien. Lorsqu’il la posa enfin, Barbara ne réagit pas. Techniquement, elle n’était plus un danger pour les humains, depuis qu’elle avait bu le contenu de cette fiole au fond de sa prison africaine elle satisfait ce cannibalisme persistant d’une autre manière. Pour autant, est-ce qu’elle n’allait pas être un problème de quelque manière que ce soit ? Elle ne pouvait ni ne voulait le garantir. Elle ferait tout pour que sa traque la mène bien jusqu’à Wonder Woman et il n’était pas exclu que leur prochain affrontement soit des plus violents.

- Sans cette malédiction je ne serais plus de ce monde et j’aime bien trop mon travail d’archéologue pour gâcher des années d’études en mourant trop tôt, répondit-elle tout d’abord avant de terminer le contenu de sa tasse et de se lever, un sourire aux lèvres. Je ne serais pas un problème dont vous aurez à vous occuper. En soit elle ne pouvait pas avoir bien tort, elle n’était pas ce dont un exorciste devait s’occuper, Urzkartaga oui mais pas elle. Peut-être bien que trouver le moyen de briser l’influence qu’il avait sur elle se révélait urgent car s’il se trouvait attaqué, il l’appellerait à son côté ce qui lui ferait ainsi perdre du temps dans ses propres projets. S'approchant de lui elle vint poser une main sur son épaule. Ce fut un moment fort délicieux John Constantine, malheureusement l'orage s'étant éloigné je crois qu'il est temps pour vous de retrouver votre habitation.