We Do This Together

Ils sont partis, un soir d’été. Partis pour sauver le monde, pour sauver l’univers d’une succession d’événements cataclysmiques qui balayaient tout ce qui existait dans l’espace et dans le temps. Un ennemi mortel, lointain, qui déréglait et détruisait tout dans une pulsion destructrice et l'expression brute d’un pouvoir absolu.

Ils étaient tous présents, ce soir-là. Superman en tête, suivi de Wonder Woman, de Green Arrow, d’Aquaman, de Flash qui saluait, jovial, la foule rassemblée devant le portail fabriqué par StarLabs et LexCorp. Batman et Cyborg, deux pas en retrait, silencieux comme toujours. Munis d’appareils inventés et produits par les plus grands cerveaux de la planète, les membres de la Justice League se sont engouffrés dans le portail, franchissant l’anneau nimbé de flammes multicolores qui marquait le départ de leur aventure de la dernière chance pour résoudre la Crise du Multivers.

Et ils ne sont jamais revenus. A la date fatidique où le monde devait, en cas d’échec de la mission, se retrouver consumé par une vague de radiations célestes destructrices, il ne se passa rien. Les héros avaient réussi, ou bien il s’était passé quelque chose… Mais le monde, lui, avait bel et bien survécu.

La vie avait continué son cours.

Pourtant, les ténèbres ne l’avaient jamais quitté.

Débarrassés de plus grands héros du monde moderne, les criminels proliféraient. Le vice renversait la vertu, la corruption gangrénait les institutions, et le monde bascula sans même s’en rendre compte. Les plus grandes villes du monde devinrent les terrains de jeu sans règles ni lois pour les voleurs et les trafiquants, les proxénètes, les meurtriers. Les rues étaient des caniveaux géants, des caniveaux pleins de sang. La police était débordée, ou aux ordres de potentats dirigeant états et mairies dans l’ombre.

Les citoyens restaient toujours défendus. Mais la nouvelle génération n’était pas prête. Et contre les horreurs peuplant le monde, appelées à se liguer pour résister aux pouvoirs quasi divins des défenseurs des nations, il n’y avait pas d’espoir de victoire, seulement du maintien du statu quo. La simple violence des rues vrilla rapidement, et se mua en quelque chose de bien pire. La folie lui donna le goût de l’exubérance, la sorcellerie de plus grands appétits de destruction, et tous les criminels du monde sentaient leur heure venue.

Des héros s’élevèrent. Parfois, pour marcher dans les traces de leurs glorieux aînés. Costumes trop grands, trop pesants pour eux, cibles de toutes les vendettas et souvent abattus malgré leur bravoure par des constellations d’ennemis ne souhaitant pas en revenir à l’ancien temps, celui où ils devaient vivre dans la peur du bat-signal, ou des capes dans le ciel. Parfois, ces jeunes générations s’élevaient pour suivre leur propre voie, pour se révolter contre l’iniquité de la violence née de l’envie, du besoin, de l’ambition des damnés de ce monde. Ils parvinrent à se rassembler, bon gré mal gré, poussés au rapprochement par les lourdes pertes déjà subies.

Le monde était au bord du chaos, quand ses héros furent enfin de retour.

Pour le meilleur. Et aussi, pour le pire.