Kent Nelson (Dr Fate) - To live alone is the fate of all great souls

Il faut bien commencer quelque part non ? On pourrait croire que c’est mon père qui a fait de moi ce que je suis aujourd’hui. On pourrait penser –à tort, qu’il m’a vu grandir, qu’il m’a élevé dans les meilleurs conditions possibles et qu’à ses côtés, j’ai tout appris de la vie. Sven Nelson –mon père donc, est pourtant mort sous mes yeux alors que je n’avais que quatorze ans. Oh bien sûr, à l’âge que j’ai aujourd’hui, j’ai depuis bien longtemps fait le deuil de cet événement traumatisant, surtout lorsque l’on connait les circonstances de sa disparition. Ma mère ? Partie quelques années plus tôt, emportée par un cancer. Je n’ai pas vraiment eu le temps de le connaitre ou même de l’apprécier, je n’étais qu’un gamin lorsque c’est arrivé. Pour mon père en revanche, j’ai eu le temps de m’attacher et de m’éprendre de sa passion pour l’archéologie et l’Egypte antique. Oui, peut-être qu’avec du recul, je me dis que j’aurais aimé avoir plus de temps à passer avec lui, mais que voulez-vous, le Destin…

Nabu. À quelques lettres près et en gardant la prononciation, on change d’univers et on se retrouve dans une galaxie lointaine, très lointaine. Quelque part, même sous le couvert de la plaisanterie, il y a du vrai. Nabu a été un père de substitution pendant six ans…paradoxale quand on sait que c’est le gaz qu’il a libéré qui a tué mon père. Objectivement, je dirais plutôt qu’il m’a recueilli et entrainé pour faire de moi son héraut. Qui est Nabu ? Concrètement, le commun des mortels le qualifierait de Dieu. Moi, je dirais plutôt qu’il s’agit d’un Seigneur Cosmique, d’une entité immortelle et surnaturelle qui prend l’apparence la plus supportable possible pour le cerveau de l’Homme. Donc, c’est Nabu qui a créé ce que je suis : Doctor Fate. Sa conscience et son essence existent en animation suspendue dans ce très joli casque dont il m’avait fait cadeau, cet artefact qui me permet de devenir son avatar et de posséder des pouvoirs dépassant l’entendement.

Privé de ce qui forge, de ce qui forme les êtres que sont les humains, je ne me considère pas comme tel. Je n’ai jamais été enfant, je n’ai pas eu de jeunesse. Les Dieux anciens m’ont créé tel que je suis maintenant et m’ont placé ici, sur cette Terre pour combattre la sorcellerie maléfique. Wotan a été le premier d’entre eux, le premier d’une longue lignée. Erreur de jeunesse, empressement ou soucis d’être radical dans ma manière de procéder, je n’ai montré aucune pitié envers Wotan. Je l’ai tué. Un grand homme a un jour dit qu’éliminer un tueur ne changeait pas le nombre d’assassin et pourtant, pourtant je ne suis pas de cet avis. Peut-être est-ce l’influence de Nabu sur mon âme qui me fait penser cela, je ne sais pas. Peut-être avais-je manqué d’expérience, ou de jugement quant à la condition de cet homologue sorcier. Peut-être avais-je simplement eu besoin de prouver à Nabu que j’étais digne.

Ah, Inza…mon premier amour. Elle était otage de Wotan, je l’avais libéré et de fil en aiguille nous nous sommes mariés. C’était il y a une éternité, j’avais vingt-huit ans lorsque j’ai épousé cette magnifique femme. Inza avait été un point d’ancrage dans ma vie, une femme simple –au sens noble du terme, qui me permettait de m’accrocher à cette part d’humanité qu’il y avait en moi. Grâce à elle, j’arrivais à combattre l’influence de Nabu, à me tenir éloigner du casque et des autres artefacts pour n’être que Kent Nelson. J’avais vingt ans lorsque j’ai rencontré Inza pour la première fois et c’est elle qui me poussa à poursuivre mes études en médecine. Pourquoi parler de ce que j’ai abandonné ? Parce que lorsque le Destin m’arracha Inza, je tournais le dos à mon parcours pour me rabattre ce que j’avais toujours connu : l’archéologie.

J’aurais pu m’accrocher à cette vie partagée avec Inza, mais je n’en avais pas eu la force et, Nabu avait compris qu’il pouvait utiliser cette faiblesse pour me contraindre à revenir vers lui. C’était la solution de facilité, retourner à ma zone de confort, remettre le casque et m’isoler dans la Tour de Guet afin de surveiller, d’anticiper les menaces qui pesaient sur ma planète. Ce qui est assez tragique, c’est que je fis ce choix au dépend de ma fille Laryn –fruit de mon amour avec Inza et, que je l’abandonnais totalement. Je préférais donc me laisser trainer et entrainer par Nabu, plutôt que d’élever mon propre enfant. Je gardais tout de même un œil distrait sur elle, tentant de m’assurer qu’elle allait bien et qu’elle s’épanouissait…sans savoir que j’étais son père. Elle l’apprit l’année de ses vingt ans, quelques secondes avant que sa vie ne soit arrachée par Sabbac, sous mes yeux, sans que je ne sois de taille à l’affronter.