You always have to keep hope [Terminé - Intrigue I]

You always have to keep hope
@Clark Kent ༄

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Metropolis. Vingt-deux heure trente. A cette heure-ci la plus part des habitants de la ville sont chez eux. Confortablement installé dans le canapé regardant la télévision. Ou même déjà endormis dans les bras de Morphée. Mais pas moi. Je venais tout juste d’arriver dans le quartier de Bakerline, une grande zone portuaire constamment en activité, de jour comme de nuit d’ailleurs. Bien que ce soir, tout soit assez calme. Vous vous demandez certainement ce que je pouvais bien faire ici à une heure aussi tardive et seule. Je venais chercher une information. Pour le travail bien évidemment. Les seules fois où je sortais de chez moi c’était pour le travail. J’étais sur une affaire importante. Du moins importante à mes yeux. Et j’avais contacté une personne susceptible de me donner une information extrêmement importante pour la suite de mes investigations. Enfin, si cette personne ne se défilait pas. Nous étions censé nous retrouver à vingt-deux heures piles. Cela faisait donc déjà une demi-heure que j’étais là à attendre. Il faisait nuit noir et le froid commençait à bien se faire ressentir. Une autre journaliste serait sans doute déjà repartie. Mais pas moi. Non, car j’étais sans doute la journaliste la plus obstinée de la ville. Au début, j’avais bien évidemment pensé à un peu de retard de la part de cet informateur. Mais à l’heure actuel j’avais bien conscience que ce rendez-vous était tombé à l’eau. La raison ? Un empêchement ? J’avais un doute. J’opterais plus facilement par un renoncement de la part de la personne en question. Est-ce qu’elle c’était ravisé par crainte ? Sans doute. Rien que cette idée m’agaçait au plus haut point. Le peu de personnes que je croisais semblait surpris de voir une femme ici à cette heure tardive. Mais je les ignorais.

Je regardais l’heure pour une énième fois. Je devais me faire à l’idée que mon rendez-vous était tombé à l’eau. Je regardais au cas où encore une fois mon téléphone portable afin de voir si je n’avais pas eu un message ou un appel. Mais rien. Je pris finalement la décision de partir. Le froid commençait à réellement s’emparer de moi et j’étais consciente que cela ne servait à rien de rester davantage. Je commençais alors à me mettre en marche. Et au bout de quelques mètres je finis par voir une silhouette au loin. A cette distance et avec la pénombre je ne distinguais pas grand-chose. Etait-ce mon informateur ? Ou peut-être était-ce simplement un employé de la zone portuaire.

Ce monde vibre de vies et d’espérances de meilleurs lendemains. Il y autant de lamentation que de bonheur, que de morts que de naissances … Je ne suis plus habitué à autant d’énergies, d’agitations et de bruits. Ni mes pouvoirs, par ailleurs. Les bombes à l’autre bout du monde me vrillent les tympans autant que les sifflements du gamin d’à côté. Mes mains font difficilement la différence entre une barre d’acier et un bout de bois. J’ai l’impression d’être redevenu ce gosse perdu, incapable de maîtriser toutes ses capacités.

Rendre le monde plus petit.

Ce conseil de ma mère me revient presqu’aussitôt en mémoire. Enfant, je me suis concentré pleinement sur sa voix ou ses battements de cœur. Adolescent, toute mon attention s’est tournée vers mon premier amour, Lana Lang, cherchant à deviner si elle est heureuse ou triste. Et adulte, une journaliste m’a tout bonnement happé – cœur, âme et esprit. Elle est ma boussole : sans elle, je suis perdu. Elle est mon pilier : en son absence, je m’écroule.

Vit-elle ?

Ce fut ma toute première question, en remettant pied dans mon monde originel. Est-elle vivante ici, ou a-t-elle succombé à l’une des mille et unes morts que j’ai pensé, entendu ou assisté au fur et à mesure de mes sauts temporels ? Par crainte, je n’ai pas osé la chercher. Par désespoir, j’ai pourtant fini par prendre le risque au lendemain de mon « retour ». Par le ciel, caché derrière d’épais nuages, je l’ai vu, enfin. En chair et en os. Aussi vivante que le reste de ce monde. Mais toujours aussi tête brulée qu’à notre première rencontre.

Que fait-elle ?

La réponse ne tarde pas, pour cette question. Encore, et toujours, elle risque sa peau pour quelques articles. Hormis pour un scoop, ou un tuyau, que ferait-elle à Bakerline ? Je me promets de continuer à la surveiller, sans intervenir, sans me montrer. Elle attend son Superman, et son Clark Kent. Ni l’un, ni l’autre, n’a survécu. Aujourd’hui, je ressemble à ces deux personnalités mais je ne le suis plus. Pourra-t-elle encore m’aimer ? Et, surtout, oserais-je véritablement la regarder droit dans les yeux – ou la toucher – avec tout ce sang sur mes mains ?

Attention

Je quitte mon perchoir, fonce sur un inconnu et le plonge sans la moindre douceur dans la baie. J’ai à peine à user de ma force. A une telle vitesse, l’eau fait largement le travail : la surface aqueuse a une résistance assez forte – donnant l’impression à quiconque de foncer droit à un mur en béton. Qui qu’il soit, il sera assommé. Et, contre gré, je le remonte et le laisse là. Trempé, je peste. Je me penche vers lui, farfouille sous son manteau et en sort une lame bien aiguisée.

Elle est là

Je reconnais ses pas.
Son odeur.
Son battement de cœur.

Je pourrais partir, mais je n’y arrive pas.
Je pourrais l’enlacer, mais je n’ose pas.

Je me contente de me retourner et de la fixer.
Bordel.
Elle m’a manqué.

Et avant même que je ne m’en rends compte – comme à l’instant – mes lèvres se plaquent contre les siennes.

Que représente le S ?

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Je venais de regarder l’heure une énième fois. Je m’étais faite à l’idée que la personne que je devais rencontrer ce soir ne viendrait pas. A mon plus grand désarroi. Je me mis donc en marche pour quitter ce quartier et rentrer chez moi. Moi qui m’étais déjà imaginé écrire des pages entières sur mon ordinateur à l’aide de ces informations. Mes plans pour le reste de la soirée tombaient à l’eau. Soit. Je trouverai bien autre chose à écrire. Des articles en suspend je n’en manquais pas. Mais une silhouette interrompre ma marche. A cette distance et dans la pénombre impossible de distinguer quelque chose de bien précis. Que faire ? Demi tour ? Non. Je continue, je n’ai pas peur. Je continue.

A plus j’avance et a plus il est aisé de distinguer cette silhouette. Étrangement j’ai l’impression de reconnaître cette silhouette. Elle m’est familière. Rien que de songer à cette personne je sens mon cœur se serrer. C’est tout bonnement impossible. J’avance toujours, doucement mais sûrement. En silence. Et là il se retourne. Je n’arrive pas à y croire. Il est là devant moi, Clark, mon bien aimé, l’amour de ma vie. Complètement trempé. Mon premier réflexe est penser qu’il s’agit d’un rêve. D’un rêve extrêmement agréable. Il est là devant moi, si proche. Et pourtant je n’y crois pas. Puis je sens ses lèvres sur les miennes. Ses lèvres si chaudes, si douces et puissantes à la fois. Et là je commence à y croire. Une fois le baiser terminé, je reste stoïque pendant quelques secondes. De longues secondes. Je plonge mon regard dans le sien. « C’est impossible... » Ma voix est légère, à peine audible. Pleine d’émotions. Mes mains se posent alors sur lui, sur son torse. Je le sens, il est bien là. Je sens même l'humidité présente sur ses vêtements. Mes mains montent alors jusqu’à son visage, le bout de mes doigts effleure ce dernier. « Tu… tu es vraiment là... » Je n’en revenais tout simplement pas. Je sens une larme chaude couler le long de ma joue. Je ne l’avais même pas senti arriver. « Comment est-ce possible... » Ce n’était même pas une question plutôt une réflexion que je me faisais à voix haute. Il y avait tant de questions qui me traversaient l’esprit. Pourtant aucune d’entre elles n’arrivaient à sortir de ma bouche. Sans doute encore sous le choc, je ne trouvais pas mes mots. Mon regard ne se détachait pas du sien. Il ne pouvait pas. Comme si la crainte de le perdre de vue une demi-seconde risquait de le faire disparaître. A nouveau.

Elle est là, sous mes yeux.
Elle est là, entre mes mains.
Elle est là, au bout de mes lèvres.

- Je ne sais pas … , lui répondis-je. Flash … Flash m’a retrouvé.

Impossible est le juste mot. Je n’aurais pas dû revenir. Je devais rester là-bas pour expier mes crimes. Flash a insisté, longuement et furieusement. Je n’ai pas cédé, à aucun de ses arguments. Puis, il a mentionné Loïs et le danger qu’elle court dans ce monde-ci : je n’ai pas su rester indifférent et j’ai accepté de le suivre, abandonnant ma pénitence lâchement.

- Il court vite, commentais-je, avec un sourire nerveux.

Je cours vite également, assez pour le concurrencer. J’ai également assez de connaissances pour aller d’un univers à l’autre – en espérant, ou en tentant encore et toujours que je ne me trompe pas dans les calculs. Pourtant, ce dernier monde a eu ma peau, mon énergie et surtout mon âme. Ce monde m’a changé profondément. Ou plutôt, il a tué celui que j’étais, et a façonné un nouvel être méconnaissable, détestable.

- Tu es là. Je suis heureux, conclus-je, incapable de dire que je suis là.

Un homme lui fait face, portant encore un S, se prénommant toujours Clark Kent. Pourtant, je ne suis plus ni l’un, ni l’autre. Je suis Kal-El, un Kryptonien sans planète. Je suis un intrus ayant d’immenses pouvoirs, dangereux par nature pour les terriers. Je suis un criminel en liberté, jouant les justiciers. Je fraude et je mens à celle que j’aime, à celle qui m’a élevé, à ceux qui m’ont soutenu et à ceux qui croient en moi. Nul syndrome de l’imposteur : je ne dis que la vérité.

La fatigue me gagne – malgré que mon corps n’éprouve rien. Je veux tant me délaisser, un peu, de tout ce poids que je porte, que ce soit ces responsabilités ou cette culpabilité. Je souhaite aimer, à nouveau, ma Loïs sans honte, sans malaise, sans remord. Je désire échanger avec mes amis, sans craindre leurs regards inquisiteurs. Que ne donnerai-je pas pour obtenir le pardon pour tous ces morts et ces pertes. Que ne ferais-je pour retrouver une seule nuit possible, et être à nouveau capable de me regarder dans un miroir. Je serais capable de tout. Et c’est bien ce qui m’effraie.

J’ai peur de moi-même, car il n’existe personne capable de m’arrêter … Ni Batman, ni Wonder Woman, ni Loïs, ni Zod, ni Lex …

- Tu m’as tellement manqué. Si tu savais … Un enfer, sans toi. J’ai vu … tant de monde. J’ai vu … tant de toi … tant de … , avouais-je, m’étranglant vers la fin de cette phrase.

J’ai vu tant de Loïs sans que ce ne soit celle que j’aime. J’ai souffert silencieusement, à chacune des rencontres. J’ai vu tant de catastrophes la touchant – ou nous touchant. J’ai cru perdre la tête, à plusieurs reprises. Ensemble, nous sommes forts. Séparés, nous sommes dangereux l’un pour l’autre – ou pour nous-même. Cet amour est autant une bénédiction qu’une malédiction. Rien qu’être avec elle est déjà une folie. Je sais maintenant tout ce que je suis capable de faire pour elle.

Je fuis son regard. Et je me mure dans le silence.

Que représente le S ?

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Clark était là, devant moi. Ses lèvres s’étaient même déposées, le temps de quelques secondes, sur les miennes. Etait-ce un rêve ? Un de ceux qui m’étais souvent arrivé de faire. C’est ce que j’avais pensé au début. Mais très rapidement je m’étais rendu compte que non, ce n’était pas un songe. Tout ceci était bien réel. La joie et l’incompréhension se mélangeaient rapidement. Tant de questions traversaient mon esprit. Des questions qui, sans vraiment le vouloir, étaient sorties de ma bouche. Apparemment même Clark ne savait pas réellement comment il était revenu. Il se contenta de dire que Flash l’avait retrouvé. Le temps d’une seconde je regrettai que ce dernier ne soit pas là pour que je puisse le remercier infiniment de m’avoir ramené ma moitié. Et quand Clark ajouta que Flash courait vite je ne pus m’empêcher de rire le temps de quelques secondes à peine. « Oui... » fut le seul mot qui réussit à sortir de ma bouche. Ce rire nerveux qui traduisait sans nul doute mon incompréhension totale.

Le jeune homme constata le fait que j’étais là et qu’il en était heureux. Mes mains toujours sur son torse, mon regard toujours dans le sien je réponds simplement « Oui je suis là. Et toi aussi tu es là… J’ai tellement de mal à y croire... » Et pourtant. C’était vrai. Bien que j’ai souvent rêvé de Clark depuis sa disparition, je n’avais jamais réussi à sentir sa peau contre la mienne, comme maintenant. Je devais donc y croire. Il était de retour. Clark vint ensuite me dire que je lui avait beaucoup manqué. Il continua alors à parler, me disant qu’il avait vu tant de monde, tant de moi. Le jeune homme ne put terminé sa phrase. Cela semblait trop difficile pour lui. C’était inhabituel de voir Clark ainsi. Peut-être avait-il lui aussi du mal à réaliser. Ou était-ce tout autre chose ? Son regard devient même fuyant tout d’un coup. Instinctivement mes mains viennent se poser sur chacun de ses joue, encadrant ainsi délicatement et tendrement son visage. « Chut… Clark s’est terminé. Tu es là maintenant. » Ne le quittant toujours pas des yeux je me livre moi aussi à des confidences « Tu mas tellement manqué aussi. Ma vie n’a plus de sens sans toi… » Mais maintenant cela à changé je me reprends donc « Elle n’avait plus de sens... » Clark de retour, j'allai sans doute retrouver goût à la vie tout simplement.

Selon les films romantiques, deux amants qui se retrouvent s’embrassent jusqu’à manquer de souffles et font l’amour jusqu’au petit matin. La vérité est différente. Nous sommes maladroits, incapable de nous rappeler ce que l’autre aimait – ou n’aimait pas. Nous cherchons nos repères en réapprivoisant ce corps : on respire son odeur, on se perd dans cette crinière de feu, on balade timidement des doigts sur le visage ou sur les bras, on écoute cette voix et surtout on se perd dans le regard de l’autre. Nous sommes craintifs et interrogatifs également. Est-ce que nous pouvons encore nous aimer alors que le temps et la séparation nous ont drastiquement et profondément changé ?

Mon amour pour Loïs est inébranlable, et infini. Je l’aimerai aujourd’hui, demain et toutes les années qui me seront permises de vivre avec cette constitution hors norme. Je l’adorerai toujours malgré toutes ses erreurs : ses qualités, défauts, ou sa personne tout simplement éclipsent toutes ces choses-là. Elle est ma boussole, elle est ma morale, elle est mon soleil. Je suis tout bonnement sous son charme. Je ferais tout pour elle.

- Ce n’est pas terminé … c’est impossible, finis-je par dire, m’étranglant à nouveau.

Ce n’est que le début. Je le sens. Les cauchemars, les nuits blanches, les confusions ne seront que les premiers symptômes. Je pensais avoir surmonté tous ces stades là-bas, mais cette nouvelle réalité n’a fait qu’éveiller de vieux démons – ou nouveaux démons. Ici, la vie grouille partout : les rires, les cris, les guerres, les jeux. Là-bas, ce n’est que cendre, silence et mort. Ici, tous mes proches sont vivants, et sont heureux de me revoir. Là-bas, je prie pour leur âme dans un exil imposé par les rares survivants – incapable de me supporter.

- Tu n’aurais pas … dû attendre. Tu aurais dû … être heureuse, sans moi, dis-je, ne contrôlant pas cette colère au fond de mon gosier. Mais je suis heureux que tu es là. Avec moi. Juste moi.

D’une part, je suis en colère qu’elle m’ait attendu. D’autre, je suis enragé à la simple idée qu’un autre que moi puisse la toucher, l’aimer, la rendre heureuse.

- Loïs Lane. Vous êtes faites … pour me rendre fou.

Fou d’amour.
Fou de rage.
Quelle différence entre ces deux sentiments ?

- Rentrons.

Sans lui laisser la moindre chance de répondre ou de contester, je la saisis et la traine un peu au-dessus des nuages. Personne ne doit voir que Superman est de retour – qu’importe que je porte mon costume, ou non. Par contre, je ne peux pas non plus trainer de longues minutes ou heures dans les parages : Loïs ne peut pas supporter cette température glaciale. Alors, j’accélère, maintenant la bonne vitesse pour qu’elle ne devienne pas non plus une crêpe. A quelques reprises, je m’arrête à quelques sommets vertigineux de gratte-ciel pour m’assurer qu’elle n’est pas malmenée. Enfin, nous arrivons à destination, m’arrêtant dans un coin de rue un brin sombre où il n’y a personne – ni dans la rue en question, ni derrière les fenêtres donnant vues à cette dernière.

Je refuse de briser des fenêtres ou des portes pour entrer dans notre propre appartement. Je la laisse ouvrir le chemin, et me rappeler que j’avais une vie avant, avec elle, entre ces quatre murs cosy.

Que représente le S ?

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J’avais toujours eu pour habitude de voir Clark serein, souvent sûr de ce qu’il faisait ou voulait faire. C’est donc une chose inhabituel pour moi de le voir ainsi, n’arrivant pas à terminer ses phrases . C’est comme si parler à cœur ouvert lui était trop difficile. Le jeune homme ne semblait même pas croire lui même à son retour. C’est impossible, tels étaient ses mots. Submergée par l’émotion, je me laisse aller à la confidence, lui déclarant que ma vie sans lui n’avait plus de sens. Depuis son départ je n’étais plus que l’ombre de moi même. Rien d’autre. Je vivais seulement pour le travail. Clark vient me dire que je n’aurais pas dû attendre, que j’aurais dû être heureuse sans lui. Fronçant instinctivement les sourcils face à, ce qui était pour moi, une aberration des plus totale, je réponds « Être heureuse dans toi ? C’est impossible... » Il n’y avait pas d’autres réponses à donner. D’ailleurs à aucun moment, jamais, l’idée de refaire ma vie avec quelqu’un d’autre m’avait traversé l’esprit. Dans le fond, une partie de moi avait disparu avec lui. Mais il dit être heureux que je sois là, avec lui et uniquement lui. Un léger sourire se dessine sur mon visage. Et que dire de la suite ? Moi faite pour le rendre fou ? Ne serait-ce pas plutôt l’inverse ? Ou plutôt réciproque. « Alors que devrais-je dire de vous Clark Kent ? » Question rhétorique bien entendu. Il m’avait toujours fasciné, il m’avait toujours rendu heureuse et sans doute meilleure aussi.

Par la suite, Clark décida de rentrer. Ce n’était pas une mauvaise idée. Il commençait à se faire très tard et le froid gagnait petit à petit tout mon corps. De toute manière je n’avais pas eu le temps de répondre ou de contester sa décision. En un dixième de seconde je me retrouve contre lui planant au dessus des nuages. La sensation est étrange car elle ne m’était plus familière. Le froid est davantage rigoureux à cette hauteur. Mais après plusieurs pauses, nous finissons par arriver à destination. Chez moi, chez nous. Je ne me fais pas prier et ouvre la marche pour faire les quelques mètres qui nous séparent de l’immeuble. A cette heure-ci la rue était déserte. Puis une fois devant la porté d’entrée, je fouille quelques secondes dans mon sac pour y sortir la clé et l’introduire dans la serrure. J’ouvre la porte pour que nous puissions rentrer. Rentrer tous les deux. Combien de fois ais-je pu m’imaginer cette scène ? Et cette fois-ci elle était réelle. Je referme la porte derrière nous et allume la lumière. A peine rentrée, je sens la chaleur de l’appartement me réchauffer un peu. Je retire donc mon manteau, mes chaussures. Je me retourne vers Clark, ses vêtements sont encore bien humides. « Tu devrais te changer... » un simple conseils, être vêtu de vêtements humides n’était jamais chose agréable. Et puis ici il y avait ses affaires. Toutes ses affaires. Je n’avais rien jeté. Cela avait été au dessus de mes forces. J’étais là devant lui. Il était là devant moi. Mon regard dans le sien je viens poser une main délicate sur sa joue « Je t’aime tellement... » Les mots étaient sortis tout seul, j'avais ressenti le besoin de le lui dire.

Clark Kent. Ce prénom et ce nom sonnent si faux, subitement. Puis-je encore être ce gosse idéaliste et naïf du Kansas ? Puis-je toujours prétendre être ce journaliste avide de vérité et de justice ? Ai-je encore le droit de simplement poser un regard sur ce brin de femme admirable ? Ai-je encore tous ces droits ? Je veux, mais je ne peux plus. Cette réalité m’emplit d’autant de rage que de désespoir. Ni l’air glacial d’un ciel dégagé, ni la chaleur cosy de notre appartement n’arrivent à calmer cette émotion qui gronde et qui fulmine au creux de mon estomac.

Lorsque Loïs soumet l’idée que je devrais me changer, je ne fais rien. Je me contente de rester au palier et à fixer ce décor. Mon regard s’attarde sur chaque détail : quelques tasses dans l’évier, des plaids sur le canapé, des chaussons qui se baladent par-ci et par-là, des nombreuses lettres entassées dans un coin, une table blindée d’articles, de notes et de carnets et supportant encore un ordinateur portable, ces décorations exotiques que j’avais amené de mes différentes expéditions à travers le monde – ou qu’elle-même avait amené de ses propres voyages.

Rien ne semble avoir changé. Et pourtant, je me sens si étranger.

Je vois Loïs s’approcher. Je sens sa main sur ma joue. Et j’entends ses paroles, plein de sincérités. Je sais qu’elles sont adressées au souvenir d’un homme qui n’existe plus. Ne suis-je pas un imposteur, à me nourrir d’émotions auxquelles je n’ai plus le droit ? Ne suis-je pas lâche, en cachant toujours ces crimes qui minent ? Ne suis-je pas hypocrite, à répondre à ses demandes, me saisissant de sa main, posant encore mon front contre le sien et déposant une main sur son bassin ?

Je ne peux pas continuer cette comédie. Je l’écarte doucement, d’un geste non brusque.

- Le froid ne me fait rien. Mais toi, tu risques de tomber malade. Va prendre un bon bain chaud. J’attends ici. Je ne pars pas, promis-je.

Je m’éloigne aussitôt. D’un pas hésitant, je prends la direction de notre chambre commune et plus précisément le placard. Je me saisis d’un jogging et d’un sweater. Si je suis plus à l’aise avec un jean usé et une vieille chemise, je sais aussi que dans ce monde-ci, ce n’est pas l’usage de dormir avec dans son lit. Je fronce des sourcils et fixe le lit. Non, je ne peux plus dormir ici, ou plutôt avec elle.

Et subitement, la promesse faite à demi-mot me pèse lourd : Je ne pars pas. Quel idiot ! Comment ai-je pu flancher aussi rapidement et aussi aisément ? Comment ai-je pu oublier aussi vite et aussi légèrement tout ce qu’il est passé là-bas, pour elle - voire à cause d’elle ? Qu’est-ce que je fais, avec ces bouts de vêtements entre les mains ? Qu’est-ce que j’espère en m’installant sur ce rebord de lit ? Qu’est-ce que j’attends, en m’éternisant à côté de cette femme qui me rend, véritablement, fou ?

A toutes ces questions, je n’ai qu’une réponse : je ne sais pas.
Et je me prends la tête entre les mains, las de toutes ces réflexions et de cette culpabilité.

Que représente le S ?

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@Clark Kent ༄

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Nous étions arrivé à l’appartement. Notre appartement. Car oui malgré la disparition de Clark, malgré cette longue absence le lieu était resté notre appartement. Je n’avais touché à rien, même pas à ses affaires personnelles. Je n’avais jamais réussi à me débarrasser de quoi que ce soit. Dans le fond j’avais toujours espéré son retour. Et j’avais bien fait. Bien qu’heureuse, le voir ou plutôt le revoir en ces lieux est une drome de sensation. Je constate que ces vêtements sont trempés, je lui suggère donc d’aller se changer. Je sais qu’il ne craint pas le froid mais la sensation du tissu mouillé sur soi ne devait pas être des plus agréables. Et le voyant là, face à moi, je ne peux m’empêcher d’avoir un geste tendre envers lui. Un geste tendre accompagné de mots doux mai surtout sincères. Le jeune homme m’écarte doucement, me répondant que le froid ne lui faisait rien, mais il me conseilla de prendre un bain chaud. Il précisa par la suite qu’il ne partait pas, ce qu’il attendais ici. Je n’ai pas le temps de répondre que Clark s’éloigne aussitôt, prenant la direction de la chambre à coucher. Un peu perplexe, je le laisse malgré tout aller.

Je pose mes affaires et en profite pour augmenter un peu la température du thermostat. Je repensais aux paroles de Clark. Il avait sans doute raison, un bon bain chaud ne me ferait sans doute pas de mal. Je prends donc la direction de la salle de bain. Mais en passant devant la porte de la chambre, ouverte, j’aperçois Clark assis sur le rebord du lit. Le visage entre ses mains, il semblait perdu ? Perplexe ? Je n’avais pas réellement les mots tant je n’avais pas l’habitude de voir mon adonis ainsi. Fronçant légèrement les sourcils, je l’observe quelques secondes en silence. Je décide alors d’entrer dans la pièce, faisait quelque pas vers lui. « Clark ? » Je suis clairement intriguée par son comportement. Je ne le quitte pas des yeux. Je viens m’asseoir délicatement à ses côté. Une de mes mains vient se poser délicatement sur une de ses cuisses « Est-ce que tout va bien ? » Je posais la question mais j’avais malgré tout déjà une vague idée de la réponse. « Tu sais que tu peux tout me dire... » J'avais précises ma pensée avec ces quelques derniers mots, j'avais comme le présentiment que le jeune homme ne parlerait pas si facilement. Et pourtant, jadis on parlait de tout, on se confiait.

Clark. Kal-El. Superman. Tant de noms pour un seul homme – si je peux encore me considérer ainsi. Le premier est un homme du Kansas sans histoire, faisant son petit chemin tant bien que mal. Le second est l’un des rares survivants d’une planète morte et oubliée, propulsé sur la Terre, sans aucun guide. Le troisième est la combinaison des deux premiers, essayant d’apporter un semblant de paix et d’espoir à des Terriens impuissants face à des êtres venus par-delà les Etoiles. Aujourd’hui, et après tous ces événements, est-ce que je peux encore être l’un ou l’autre ?

Je n’ose pas relever la tête lorsque Loïs m’interroge davantage. Elle me rassure, autant qu’elle peut. Je sais que je peux tout lui dire : elle est assez forte pour encaisser les mille horreurs que j’ai commis là-bas. Par contre, je ne peux pas dire : je n’ai pas le courage d’avouer mes crimes à haute voix. Ce soir, je veux être égoïste et profiter d’un instant avec celle que je ne pensais plus revoir. Demain, j’aviserai sur notre avenir.

- Pas ce soir, Loïs. Ni demain. Je n’en suis pas capable. Mais je te promets, nous en parlerons. J’ai besoin de temps, c’est tout, promis-je. Promets-moi que tu ne vas pas chercher ces réponses, d’ici là. Tu n’auras pas beaucoup à attendre, je t’assure.

Je la connais assez pour deviner ses prochains mouvements. Elle est trop curieuse pour se contenter d’une promesse aussi incertaine et aussi laconique que « un jour ». J’aurais pu ne rien dire, la laisser mener sa propre investigation et découvrir les méfaits qui me rongent jour et nuit depuis de nombreuses semaines – voire des mois. Mais je m’y refuse. C’est une attitude lâche, qui ne me sied pas et, surtout, qui ne correspond pas à notre relation. Il n’a jamais été question de cachotteries aussi terribles, de fureter dans le dos d’un autre et j’en passe …. Nous sommes bien au-dessus de tout ça.

Ma main se pose sur la sienne. Petite, douce et chaude, elle est surtout réconfortante. Je finis par poser ma tête sur la sienne, à humer cette odeur ou à me concentrer sur ces battements de cœur. Subitement, je sursaute et dirige mon regard vers une direction. Je ne vois pas un mur, je vois bien plus loin le quartier, la ville, voire les frontières du pays. J’inspire profondément, ferme les yeux et tente de me concentrer sur ce rythme cardiaque non loin de moi. Non sans difficulté, j’arrive à réduire mon environnement à cette petite pièce.

- Je dois m’adapter, à nouveau, à ce monde, tentais-je d’expliquer à la journaliste, les traits crispés par la gêne et la colère.

Je veux aider mais, subitement, je doute de pouvoir le faire. Suis-je véritablement une réponse à toutes ces menaces tant terriennes qu’extra-terrestres ? Me suis-je lourdement trompé sur mes propres capacités et idéaux ? Est-ce que je n’apporterai pas plus à ce monde en prenant une forme de retraite ? Cette dernière question m’inquiète subitement. Je ne peux pas envisager une option où je continue à être Superman.

Du moins, pas sans avoir payé pour mes crimes.
N’est-ce pas ?

- Pendant que tu prends un bain, je vais en profiter pour me rendre à la Forteresse, et m’assurer que tout est en place. Je serais de retour dans moins d’une heure.

Sans plus un mot, je me relève et me prépare à partir. Obnubilé par ma mère adoptive et par Loïs, j’en ai oublié ce lieu important et critique également. Il y a tant de savoirs et de matériaux précieux, dont beaucoup d’autres planètes, que la Forteresse est vite devenue un lieu aussi mythique que convoitée par les plus fous de ce monde. Est-ce qu’on a mis la main sur cette dernière pendant mon absence ? Ont-ils saccagé cette seconde maison, comme ils l’ont fait avec la demeure de Bruce ?

Que représente le S ?