The big final [Intrigue IV - Terminé]

Deux opérations sur trois ont été de francs succès, entrainant Bludhaven sur une délicieuse pente chaotique !

La population exerce une franche pression sur le gouvernement et les forces de l’ordre pourris jusqu’à l’os pour une explication sur les voyageurs disparus d’une rame de métro détruit et plein de sang. Ces institutions sont tout autant sollicités dans les rues, jour après jour, pour tenter de contenir une guerre de gang considérable et meurtrière. Quant aux criminels, il y a ceux qui se vendent aux plus offrants, ceux qui jurent loyauté et fidélité et ceux qui jouent double-jeu, rajoutant toujours plus de piments et de drames à ces événements !

Maintenant, il faut s’attaquer au dernier acte – ou plutôt avant-dernier acte. S’il y a suffisamment de morts violentes, la ville reste modeste en taille. Je ne vais pas avoir une ouverture complète, totale et durable des portes des Enfers. Au mieux, un entrebâillement d’où pourrait se glisser quelques démons inférieurs ou supérieurs. Au pire, une fissure définitive, ou, profonde. Dans le premier cas, j’aurais de nouveaux soutiens dans mes projets à venir. Dans le second cas, je pourrais puiser de la magie démoniaque de cette fissure-ci, lorsqu’il faudra retenter une ouverture ailleurs.

Nous aviserons, en temps et en heure.

Toujours est-il que j’ai besoin de soutiens conséquents. Mes frères m’ont indiqué qu’ils ne seront présents que lorsque j’aurais préparé le rituel, et que j’aurais trouvé une solution pour assurer notre sécurité durant le sort. Si je peux parfaitement me charger du premier point, j’ai clairement besoin d’un coup de main solide pour le second point.

Et c’est là que monsieur Collant Noir et Eclair Jaune entre en jeu ! Je me rappelle encore de notre première et unique rencontre. Il a su me charmer avec son manque de scrupules et ses connaissances en magie. Enfin, et plus important, monsieur le vilain mage est un sacré puits de puissance ! Encore aujourd’hui, je me souviens vivement de ces picotements sur ma peau ! Seuls ceux qui détiennent une magie puissante peuvent me faire un tel effet.

Alors, j’ai tenté ma chance, usant de ce lien magique qu’on a établi.

Salut ! T’es tenté d’adopter un chien démoniaque ? Si oui, passe à Bludhaven et aide-moi à ouvrir la fourrière !

Le message manque terriblement de détails, et de formalités, mais qu’importe ! S’il comprend ou s’il ose s’aventurer dans l’inconnu, c’est qu’il est l’homme de la situation. S’il se montre timoré, ou condescendant, c’est que je me suis considérablement trompée sur son compte et couperais les ponts avec tout simplement. Je n’ai guère le temps de gérer de petites divas de la scène magique !

Puis, j’ai grande hâte d’en finir avec Bludhaven. Je veux savoir quelles sont les conclusions de ces tentatives, et profiter de l’expérience acquise pour re-tenter ma chance à plus grande échelle – à Gotham City ou à Starcity. Evidemment, pour ces deux villes, j’aurais à faire preuve davantage de subtilités. Entre le Chevalier Noir devenu dingo et l’Archer Vert solitaire, y a de sérieux challengers !

Un picotement me traverse. Un fin sourire s’étend sur mes lèvres.

- SALUT ! Alors, tu es prêt à adopter quelques êtres démoniaques ? m’enquis-je, regard brillant, sourire taquin aux lèvres.

- S’ils deviennent trop encombrants, il suffit de les abandonner dans une ville pourrie ou de les envoyer chez un magicien angélique pour une piqûre ! Les solutions ne manquent pas sur cette terre !

Les chiens démoniaques ne sont pas si différents que les chiens lambdas. Si le maître sait éduquer son clébard convenablement, il est assuré d’avoir un compagnon extrêmement fidèle. A l’inverse, s’il manque à ses obligations – la nourriture, les ordres, les entraînements –, la bête devient soit fainéante, soit incontrôlable. J’ai vu ces créatures à l’œuvre dans les Enfers. Elles sont extrêmement efficaces, flairant convenablement les âmes maudites ou pures, cherchant inlassablement les traces de magie, de démons, d’hommes. Par contre, je n’ai absolument aucune idée de leur utilité sur la planète terre, dont l’environnement est très différent de leur habitat naturel. En dépit de tous les risques, j’aimerais bien en adopter si jamais l’occasion se présente.

- La prime ? Ah. Oui. Cette bagatelle. Oui, oui, j’ai reçu mes précieux dollars.

Je réponds, avec un certain ennui et nonchalance. Cet éclat de folie s’estompe presqu’aussitôt que l’on parle de choses banales, comme l’argent, la vie, l’amour et toutes ces choses. Quoique, pour quelques précieuses secondes, l’image du Doc’ s’impose à moi, me chamboulant un brin le rythme cardiaque. Je suis ainsi depuis l’épisode du métro. Que se passe-t-il donc ? Je n’aime pas, et j’aime tout autant. Bizarre, très bizarre !

- Toi et moi sommes à cet instant clé de mon histoire où je révèle tout, absolument tout, de mes origines et de mes plans.

Mon ton est spectaculaire, mes gestes exagérés. Je me fige, et le nargue d’un sourire amusé.

- Mais, toi et moi avons autre chose à foutre que d’écouter ma biographie ! Par contre, toi et moi avons beaucoup à gagner si nous réussissons mon plan : ouvrir la porte des Enfers ou, du moins, essayer.

J’attends quelques précieuses secondes pour que l’information fasse son chemin. Adieu paillette et mise en scène, bonjour sérieux et malice.

- Je me suis établie à Bludhaven depuis de longs mois, à causer chamboulement sur chamboulement. Avec l’aide d’un scientifique, j’ai tenté d’empoisonner les eaux publiques, j’ai échoué. Toujours avec l’aide de ce scientifique, j’ai gazé une rame de métro d’un poison et j’ai usé d’un peu de magie pour enterrer tous ces corps morts, blessés ou vivants sous terres. Enfin, par la séduction, par la magie, par le mimétisme, j’ai réussi à déclencher une guerre de gang assez importante. Le sang est versé quasiment … toutes les heures, peut-être. Entends donc le chaos. Sens donc le désespoir.

Je me glisse jusqu’à lui, ricanant des plus belles.

- Les morts sous terre. Les morts sur terre. Une malédiction de l’air, de la terre, du feu et de l’eau dans quelques petits bouteilles. Une bonne dose de magie. J’ai absolument tout pour tenter cette ouverture.

Je le fixe du regard.

- Je ne peux rien t’offrir, personnellement, pour tout aide que tu peux m’apporter. Par contre, si nous réussissons, je pense que quelques démons supérieurs, peut-être même Lucifer en personne, seront extrêmement reconnaissants ou de bonne humeur. Il se peut que tu puisses faire quelques demandes : un nouveau compagnon comme un nouveau démon ou un chien infernal ou alors davantage de puissance pour égaler un dieu en slip rouge par exemple.

L’offre nébuleuse est faite. Je ne crains pas sa colère car il est comme moi, j’en suis certaine. Qu’importe l’argent, qu’importe l’or, tout ce qui compte est le sang et le chaos.

- Le monde est bien petit ! Zatachatte est la petite copine de daddy. Et daddy a déjà deux contrats démoniaques et un contrat humain sur la tête. On dirait qu’il contamine aussi sa petite chérie.

J’étouffe un rire amusé face à une telle coïncidence. Est-ce que je suis outrée, frustrée ou alarmée qu’une entité puissante comme ce magicien court derrière la brunette ? Nullement ! Plus une personne est forte, plus elle attire des ennemis de forces égales ! La loi de ce monde est immuable et la même depuis la nuit des temps : être fort et survivre en bouffant le faible ou être faible et se faire bouffer par le plus fort.

- Son sacrifice est inutile. Elle est puissante, mais pas tant que ça. Elle doit encore grandir avant que son seul sacrifice suffise à alimenter une centrale nucléaire de malédiction. Raven était un excellent élément, mais Enchantress l’a gobé avant que je ne mette la main sur elle. Aujourd’hui, les seuls qui peuvent être intéressants sont Enchantress même, Superman, Dru-Zod et Wonder Woman. Et ils sont tout bonnement hors d’atteinte pour toi et moi. Et je ne suis pas encore assez folle pour courir derrière des dieux, armées de deux sorts.

Je hausse les épaules.

- Le sacrifice de Zatanna est intéressant que si son sang se mêle à celui de son compagnon. Car leur amour est fort, à l’épreuve du temps et presqu’une constante dans différents univers.  Et eux deux, nous pouvons les avoir.

Je lui offre un clin d’œil.

- Je vois. Tu préfères assurer tes fesses. Ce n’est pas une mauvaise idée.

Il me demande ce qu’il doit faire.

- Bludhaven est déjà à feu et à sang. Des hommes et des femmes ont été victimes d’une folie chimique et se sont entretués dans une rame de métro. Les gangs se livrent une guerre sans merci, foutant les cadavres sous terre, dans l’eau ou incinérant. Les morts alimentent tant la terre, le ciel, le feu et l’eau de leur corps, de leur cendre et de leur sang. Nous avons tous les éléments.

Le plus gros du travail est accompli.

- Je dois déclencher le sort, et tenter d’ouvrir les portes. Nous avons deux options. Nous jouons la prudence : l’un de nous se charge du sort, l’autre se charge d’être le bodyguard.

A ce mot, je récupère mon téléphone et lance la chanson emblématique du film « The Bodyguard ». Après une petite minute, j’éteins le tout et reprends mon sérieux.

- Ou nous tentons le tout et nous combinons nos puissances magiques respectives pour le sort. Mais cela veut dire qu’on sera vulnérable si une bonne âme puissante se pointe et vient perturber notre travail.  

Je joue la transparence. Ce moment est très important, mais également très dangereux. Je ne sais pas ce que ce sort va nous couter si échec, ou ce qu’il va nous apporter si réussite. Je ne sais pas davantage comment le maitre des enfers va accueillir notre tentative - sommes-nous à temps ou en retard, est-il heureux ou capricieux ? Enfin, et plus important, je ne sais pas si des super-héros m’ont dans leur viseur ou non. Ils sont comme des cafards : tenaces et partout.

Le risque est réel.
Tout autant que le gain.

La décision est prise, le jeu se lance.