Valerie.

Dinah Lance.

La salle est pleine. Au milieu de tous ces visages aux traits indiscernable, les déguisements et accessoires que certains continuent de porter par-dessus leurs costumes de fêtes me rappellent qui ils sont. Je parviens à poser quelques noms mais d’autres restent des inconnus au milieu de la foule. Pourquoi n’y a t-il pas de visage clair ? Tout est si flou. Autour de nous s’élèvent les épaisses colonnes de marbres blancs dont la hauteur vertigineuse, semblant vouloir essayer d’atteindre l'au-delà, me donne un peu la nausée. La lumière qui vient de l’extérieur en traversant les vitres colorées couverts de motifs religieux plonge la pièce dans un léger bleue, quelque chose de très pure, quelque chose qui emplit tout l’espace et mon âme. Je vais bien. Je suis heureuse. C’est le plus beau jour de ma vie. Je vais me marier. Je vais bien. Je suis heureuse ?

Je pose une main sur mon ventre alors que je pose un pied dans l’église, avançant à travers l’allée au milieu des invités, de leur regard. Je souris. C’est le plus beau jour de ma vie. Je vais me marier. Aujourd’hui se réalise mon rêve le plus ancien, le plus profond. Petite, c’est tout ce que je voulais. Avoir cette journée rien que pour moi, cette journée où j’aurais le droit d’être la plus belle des princesses pour me marier au prince charmant de mes rêves. Ma robe est parfaite. Comme je l’ai toujours imaginée. Blanche, bouffante, marquée de losanges roses de ci et là… Un diadème sur ma tête, un long voile qui tombe jusqu’à la moitié de mon dos et se soulève légèrement à chacun de mes pas. Je prends une grande inspiration et traverse l’allée dans un silence, un bouquet de rose rouge et noir dans les mains. Je continue de marcher. Les colonnes de marbres semblent toujours plus hautes, la foule toujours plus nombreuse, tout est écrasant, asphyxiant. L’angoisse me noue l’estomac. Mais j’y suis presque. Plus que quelques pas et déjà je l'aperçois. Cette tâche de violet et de vert si violente au milieu des douces couleurs pastel qui règnent autour de nous. Il a toujours été comme ça après tout, celui qui brille au milieu d’une foule terne, celui qui attire tous les regards et dont on ne peut décrocher les yeux. Il sourit et un doux rose vient colorer mes joues habituellement si pâles. Moi, en tout cas, je n’ai jamais réussi à décrocher mes yeux de ce sourire. Je pose mon pied sur la première marche, commence à monter vers l’autel où m’attend mon prince charmant, l’homme de mes rêves. La douleur dans mon estomac se fait encore plus forte, plus violente. J’aurais pensé que sa présence aurait calmé mes angoisses mais qu’importe, lorsque chacun aura dit oui il ne restera que l’allégresse du moment. N’est-ce pas ? Après tout je vais me marier. C’est le plus beau jour de ma vie.

- Harley…

De sa voix enivrante il se penche pour me murmurer à l’oreille et à cet instant je ne pense plus à aucun douleur, à ces gens sans visage et au manque d’air qui me compresse la poitrine mais à rien d’autre que lui… Car dans ses bras je suis certaine de ne plus jamais ressentir la moindre douleur, certaine qu’en restant à ses côtés il me protégera du reste du monde. Et soudainement une douleur affreuse me transperce et me penchant, j’observe ma robe de mariée et son blanc pur tachée d’une large marque rouge. Son doux sourire se change alors en rictus sordide, quelque chose de puissant qui emplit rapidement toute la pièce, se glisse dans l’esprit chacun et plus particulièrement dans le mien. Il m’a poignardé.

- Harley ?

La main qui se pose soudainement sur mon épaule me fait sursauter et réveille en moi cet instinct de défense sans même que j’ai à ouvrir les yeux, ce réflexe développé et entrainé par des années à vivre sous la constante menace d’une attaque que ce soit de celui que j’aimais lorsque je travaillais auprès du Joker ou par le reste du monde au sein de la Suicide Squad. Dans une même respiration, ma main se glisse autour du bras de la personne s’étant saisi de moi et me levant du siège ou je me reposais, vient rapidement faire glisser la personne pour la mettre au sol et la bloquer dans cette position, visage collé contre le parquet de ma location à Star City et bras bloqué dans le dos. J’expire. Inspire. Expire. Cherche à calmer les battements intempestifs de mon cœur après ce cauchemar affreux qui une nuit encore est venue perturber mon sommeil et ce réveil un petit peu brusque, finalement j’ouvre les yeux pour observer mon agresseur.

- Canary pardon !

Reconnaissant immédiatement la chevelure blonde du petit oiseau, je me relève et laisse cette dernière libre de s’envoler à sa convenance. Dire que c’était pour lui parler que je m’étais rendue jusqu’à Star city, voilà qui ne commençait pas comme je l’aurais espéré.

- Désolé pour cet accueil p’tit oiseau…

Valerie.

Dinah Lance.

Alors que je laisse Canary se remettre tranquillement sur ses deux pattes -est-ce qu’on dit patte pour un canari ? ou griffe ? ou serre ? Il faudra que j’aille regarder la réponse sur google- et s’assoir sur le fauteuil le moins usé de l’appartement miteux que je loue, je ne peux pas m’empêcher de me sentir un peu honteuse de l’accueil que je viens de lui réserver. Heureusement encore, il y a eu plus de peur que de mal pour nous deux mais le fait que j’ai pu réagir de cette manière au contact d’une alliée proche, et même d’une amie, me laisse un gout amer dans la bouche. Ce fut inoffensif cette fois-ci mais si mon état de fatigue et de nervosité continue de se dégrader, je sais que les moments d’hallucinations paranoïaques se feront de plus en plus communes et il me sera plus compliqué de prédire leur impact sur moi-même et ceux autour de moi.

Putain. Je parle vraiment comme une psy quand je m’y mets.

- Pardon, je suis un peu… Un peu sur les nerfs en ce moment.

Alors je me laisse à mon tour retomber sur le fauteuil où je m’étais assise un peu plus tôt et laissée tomber de fatigue, ramenant mes pieds sous mes fesses et laissant mes doigts remonter de bas en haut de mes jambes comme pour calmer ma nervosité.

- J’ai dû partir de Gotham un moment parce que…

C’est fou tout de même, qui aurait pu croire il y a encore quelques années à peine que la célèbre criminelle Harley Quinn confierait un jour ses problèmes et ses faiblesses à la justicière Black Canary, et que cette dernière l’écouterait avec patience et douceur. Sans qu’aucune des deux ne se foute sur la gueule, ou presque. Franchement, j’y aurais pas cru une seconde, même si mon double du futur était venue me le dire en personne. Ah… Ce que ça me ferait drôle de revoir celle que j’étais il y a des années, ce que je pourrais lui dire…

- Pour être honnête je ne gérais plus rien Dinah… Depuis l’attaque du Black Cat c’est comme si un truc en moi c’était réveillé, une sorte de terreur profonde que je pensais avoir enterré depuis le temps et… je le voyais partout tu sais… A chaque putain de coin de rue j’avais l’impression qu’il m’attendait avec l’intention de se débarrasser de moi une bonne fois pour toute ou pire...

Je soupire…

- Ou pire…

Cette idée pourrait paraitre étrange pour bien des gens mais dans mes terreurs de jour et de nuit, ce n’est même pas l’idée de mourir qui m’angoisse. Avec le Joker, il y a bien des sorts plus terribles que la mort, des choses encore plus horribles que celles que j’arrive à imaginer par moi-même. Mais lui et son esprit dérangé sauront bien les trouver, je ne me fais aucun souci là-dessus.

- C’est pour ça que je suis venu ici, m’éloigner un peu, prendre du repos…

Mon corps s’agite sans que j’y pense, mes doigts continuant de monter et redescendre le long de mes jambes et ces dernières continuant de s’agiter.

- Et puis… C’est pas pour ça que j’ai besoin de toi hein, prendre du repos je peux le faire seule, mais j’avais besoin de toi pour me préparer à l’après.

Enfin mon regard va à la rencontre de celui de Dinah. C’est un plan qui s’est formé dans mon esprit depuis ma dernière discussion avec Selina, celui de réunir toutes mes forces pour un jour me débarrasser du Joker une bonne fois pour toutes et pouvoir enfin vivre en paix. Mais je ne vais pas pouvoir mettre ce plan en action seule.

- Quand je rentrerais à Gotham, je veux être en forme et prête à m’attaquer à mon problème de clown une bonne fois pour toute, alors je vais avoir besoin d’un coach pour me remettre en forme physiquement. Il est hors de question que je me fasse encore mettre hors d’état de nuire par sa petite jeune.

Valerie.

Dinah Lance.

Je ne sais pas si j’aurais pu tuer Canary juste là, sans même être capable de discerner le cauchemar brouillant mon esprit et la réalité de la personne que je venais d’attaquer. Sûrement que non, Dinah est au moins aussi forte physiquement que moi et on s’est assez foutu sur la gueule pour que je puisse affirmer cela et être sûr de moi, son pouvoir est un avantage certains résultant dans le fait qu’elle a toujours eu sur ma personne. Pourtant l’idée de pouvoir dans un moment de surprise ou d’égarement de sa part, prendre le dessus, faire le geste de trop, m’effraie. Une arme laissée trainée à côté du fauteuil, un pistolet ou même un couteau de merde, un simple facteur différent aurait sûrement suffit pour que je m’occupe d’elle et la blesse grièvement au moins, et au pire… Tout ça sans jamais, jamais, la reconnaitre… J’en aurais rêvé pourtant quelques années plus tôt, un temps à la fois si proche et si différent d’aujourd’hui, mais aujourd’hui il me semblait impossible de faire de nouveau saigner la célèbre Black Canary.

Dinah Lance est passé d’ennemie à amie, une femme que je devais à tout prix combattre et même éliminer si l’occasion se présentait était à présent celle chez qui je me rendais pour obtenir sa protection et son réconfort… Les poings que j’avais pris un jour en pleine gueule étaient à présent des mains se posant sur les miennes pour me réconforter. Comment était-on passé d’un extrême à l’autre, je n’étais même plus sûr moi-même, mais c’était agréable de se sentir en sécurité auprès d’elle.

- Merci Dinah, je sais que je t’ai déjà beaucoup demandé par le passé et tu as toujours accepté de m’aider sans y réfléchir deux fois, alors merci pour ça.

C’est quand la dernière fois que j’ai pu dire que j’avais des amies, de véritables amies ? Ça fait un peu idiot d’être si émue à mon âge par le fait d’avoir des amies mais honnêtement je pense pas en avoir eu d’aussi vraies de ma vie. Quand j’étais gamine tout n’était que superficiel et faux, et puis en supérieur ma réputation de salope à vite eu le temps d’éloigner toutes les filles qui auraient voulu essayer de me connaitre, et après… Alors à la trentaine passée je découvre l’amitié avec les personnes les plus improbables, la vraie amitié où l’on peut tout se confier sans avoir peur du jugement, où chacune ferait tout pour protéger l’autre même s’il fallait se mettre dans la merde pour ça. Dinah Lance est mon amie, aussi étrange que ça puisse sembler. Elle m’a aidé bien des fois par le passé et encore une fois elle répond à mon appel, de la même manière que je répondrais à son appel le jour où elle aura besoin de moi, et que je la rejoindrais immédiatement.

Mais pas sans poser de question hein ? Il fallait s’en douter que j’aurais le droit à ce joli interrogatoire et je ne peux lui en vouloir, j’avais conclu un accord avec les Birds en rejoignant l’équipe, et ce que je lui demande va directement à l’encontre de cette promesse… Je devrais m’en vouloir de trahir les filles comme ça mais on parle d’un cas à part. Je peux lui jurer de ne jamais prendre une autre vie si elle me laisse simplement celle du Joker, que ce soit la dernière personne que j’élimine très bien mais il est hors de question que je le laisse plus longtemps vivre tranquillement tandis que je suis torturée par la peur.

- Je ne vais pas essayer de te mentir p’tit canary, je sais bien que tu es assez intelligente pour comprendre par toi-même ce que j’ai prévu… Mais peut-être qu’on pourrait faire semblant ?

Malgré l’angoisse, malgré la fatigue, je veux lui montrer que je suis déterminée dans mon idée.

- Si je ne le dis pas clairement mon plan tu n’as qu’à faire comme si tu ne savais pas ce que j’ai en tête, comme ça tu te coucheras ce soir avec la tête tranquille plutôt qu’à te torturer l’esprit avec ta jolie morale d’héroïne.  Parce que ne crois pas que je sais pas ce que tu vas me dire, mais ça ne servira à rien de me faire la morale cette fois-ci…

Valerie.

Dinah Lance.

- J’aurais essayé au moins j’imagine…

J’hausse les épaules, fallait s’y attendre.

- Mais oui Canary je sais bien que je ne suis pas connue pour être la personne qui passe le plus de temps à réfléchir avant d’agir okay je te l’accorde, mais celle là j’y ai pensé longuement. Et tout ce que tu me dis là j’y ai déjà pensé mais je crois qu’il n’y a rien qui m’effraie vraiment, la prison et la haine des gens je connais déjà, j’arriverais à vivre avec… Mais je ne vais pas survivre bien longtemps s’il reste en vie…

Tout ce que je voulais à présent était de pouvoir dormir.

La fatigue se faisait de plus en plus ressentir aussi bien sur mon corps que sur mon esprit, au fur et à mesure que les cauchemars venaient hanter mes nuits de la vision des plus terribles des possibilités pouvant m’arriver alors je descendais dans une folie toujours profonde, transcendant mes nuits pour m’atteindre à présent dans mes journées à travers ces hallucinations paranoïaques. Une folie dont Dinah venait malheureusement d’apercevoir une partie mais dont je ne pouvais révéler l’étendu pour ne pas l’inquiéter plus que nécessaire, pour ne pas l’effrayer peut-être aussi, pour qu’elle ne se dise pas que j’étais en train de tourner folle aussi vraie que ce soit. Parce que je deviens vraiment folle, plus folle que jamais à le voir prendre le visage de n’importe quel patient dans la rue et à l’entendre dans le craquement des murs la nuit… La crainte de ce qu’il peut me faire est plus terrible encore que le souvenir que ce qu’il m’a déjà fait subir, car je sais bien que son imagination est plus cruelle que ma mémoire.

Je sais bien que ce geste aurait des conséquences, je connais assez bien le monde dans lequel nous évoluons pour savoir que rien n’y arrive sans une conséquence immédiate mais rien, non il n’y a rien qui puisse m’effrayer plus qu’il ne m’effraye déjà, rien qui ne me retienne mentalement dans l’envie d’accomplir son plan.

- Pas encore mais j’imagine que je vais bien devoir en parler à Selina un moment où un autre, mais je ne pense pas que je vais avoir le droit à une réaction très différente de la tienne du coup le plus tard serait le mieux… A Ivy aussi mais, elle, ça lui fera plaisir je pense…

Peut-être qu’il y aurait une chose qui pourrait me retenir de ce geste et ce sont les birds, parce que dans mes nuits sans sommeil où je me demande de quelle manière ce putain de clown mérite de crever il m’arrive aussi de penser à ce que les filles vont ressentir lorsqu’elles verront en grosses lettres sur le journal que j’ai tué le Joker. C’était leur exigence quant à ma présence dans l’équipe, ne plus commettre le moindre meurtre et j’ai tenu ma parole aussi étonnant que cela puisse paraitre. Quelques petites conneries à droite à gauche, ça, okay, j’avoue ! Mais il y a un moment déjà que mes mains n’ont été souillées de rouge. Sauf que le sang du Joker ne compte pas, franchement je ne suis même pas sûr que son sang soit encore rouge comme les hommes car il est depuis longtemps déjà tombé du côté des monstres. J’ose pourtant me dire qu’elles comprendront ce geste, non pas que je devais me venger pour le passé mais bien que je devais m’en débarrasser pour le futur.

Le tuer pour enfin pouvoir me reposer…

- Je sais que je vais vous mettre dans une situation difficile avec Selina mais de toutes manières vous auriez vite réussi à comprendre mon plan alors autant être honnête, entre amies… Mais même si vous essayez de m’arrêter.

Valerie.

Dinah Lance.

Wow. Utiliser contre ma propre personne la force de la psychanalyse et de la position de cette dernière face à la vengeance est vraiment un coup bas de la part de Dinah.

Bien sûr que je suis au courant que la vengeance n'est pas une chose productive ou positive dans la construction psychologique d'une personne, sérieusement ça tuerait les gens de parfois reconnaître que j'ai un doctorat en psychiatrie et que j'ai été reçue première de promo? Mon diplôme je l'ai pas eu dans une pochette surprise. Par contre personne ne peut m'empêcher d'ignorer tout ce que j'ai appris durant mes années d'études. Faut dire que depuis que j'ai brisé l'une des règles essentielles pour un psychiatre c'est à dire ne pas tomber amoureuse d'un patient hautement dangereux, l'aider à s'échapper de prison et entamer avec lui une vie de crimes et de meurtres, ça me semble un peu plus simple d'ignorer d'autres plus petites notions apprises en cours.

- Alors oui pour ce qui est de me débarrasser de lui pour de bon je pense que c'est l'idée en effet ouai.

Sa réaction n'est pas bien etonnante. Au fond, même après le chaos et les changements de plan de ces dernières années, Dinah reste une héroïne qui a côtoyée de près la Justice League et moi une criminelle avec du sang innocent sur les mains. Pour elle tuer c'est l'acte ultime, pour moi un lundi matin. Elle ne peut pas comprendre, c'est tout. J'aurais aimé mais c'est impossible.

Reste à espérer qu'elle me pardonnera tout de même cet acte lorsque je le tuerai au final. Parce que je vais le faire, non pas comme une vengeance comme elle à l'air de le penser, parce que franchement si c'était le cas il mériterait un sort bien plus cruel que la mort pour tout ce qu'il m'a fait subir, mais simplement pour survivre. Pour vivre.

- Dinah. Il va me tuer tu le sais hein?

J'hésites, puis continue.

- On sait toi comme moi que le Joker me cherche et vu ce qu'il a fait subir au Black Cat la dernière fois il m'a l'air pas mal motivé pour me retrouver. Donc j'imagine sans problème qu'il a prévu de terminer le travail que sa petite pute avait bâclée la dernière fois et se débarrasser de moi.

Je m'enfonce un peu plus dans mon fauteuil et regarde à travers la fenêtre, cherchant à éviter à tout prix le regard de Dinah. Je ne sais pas trop si j'y trouverais de la pitié ou du jugement mais honnêtement je n'ai envie d'y trouver ni l'un ni l'autre. Je ne suis ni victime ni criminelle. Simplement je veux survivre.

Simplement je vais survivre.

- Je peux la jouer réglo comme toi, comme Selina ou même comme Barman la fait pendant des années et l'envoyer en prison en espérant qu'il devienne soudainement doux comme un agneau mais en fait, non. En fait j'ai pas envie d'être une autre de ces victimes et qu'on me retrouve égorgée dans mon sommeil, je refuse d'apparaître dans les statistiques. Alors moi je prends l'offensive. Si je dois crever je vais l'emporter avec moi dans la tombe.

Valerie.

Dinah Lance.

La remarque de Dinah m'arracha un sourire amer et je me refermais un peu plus dans mon fauteuil, ramenant mes jambes contre mon torse et me faisant soudainement petite, toute petite. Voilà ce que c'était donc que de traîner avec des super-héros en slip, incapable de voir une femme battue sans vouloir immédiatement la sauver de son bourreau et d'elle même. Enfin bon, je vais pas non plus critiquer le fait de pas être un immense connard.

Mais Dinah ne comprend pas que je ne lui demande pas sa protection mais son soutien aujourd'hui, elle ne peut pas me comprendre.  Dialogue de sourds. J'enfonce ma tête dans mes genoux, évite toujours plus son regard qui semble trop me rappeler que face à elle je resterais toujours l'ancienne criminelle répètent à tuer sans le moindre scrupule. Pour elle, ce serait le pire truc qu'elle puisse jamais faire mais pour une moins que rien comme moi, tuer le joker ce serait la meilleur chose que j'ai jamais fait pour l'humanité.

- C'est drôle tiens, Selina m'a dit un truc similaire avant que je parte… Comme quoi vous seriez toutes prêtes à vous battre jusqu'à la mort plutôt que de le laisser me toucher.

Ça me ferait presque rire dans un autre contexte, mais là rien ne vient. Je suis juste si fatiguée de tout ce qui s'est passé ces derniers temps, fatiguée de trop nombreuses nuits blanches et de journées noircis d'angoisses. Et cette discussion sans but puise mes dernières forces.

Putain. Bien sûr que je savais qu'elle allait sauter de joie à l'idée que je bute quelqu'un mais j'aurais vraiment espère qu'elle comprenne, qu'elle fasse une exception pour lui quoi. Quelques larmes coulent. La fatigue on dira.

- Ça me touche vraiment. Je ne veux pas que tu penses que je ne te prends pas au sérieux parce que je sais que tu le ferais vraiment…

"Comme tu l'as déjà fait par le passé"; je me retins d'ajouter au dernier moment pour ne pas raviver de souvenirs encore trop douloureux alors que j'étais déjà complètement éclatée mentallement et incapable de gérer mes émotions, mais je me doutais bien que Dibah arriverait à le comprendre dans que j'ai besoin du moindre mot. Simplement dans mon silence. Ce souvenir là, il était toujours présent entre nous. Dans chaque mot et chaque silence, dans chaque contact et chaque absence…

- Mais je ne veux pas être protégée… Je… Je ne veux plus être victime qu'on doit protéger de ses coups tu comprends? Putain je veux pas que vous me protégiez et qu'il vous fasse du mal aussi! Parce que je sais que tu vas te mettre entre nous s'il le faut pour me protéger et ça me terrifie tellement? Parce que là dernière fois au Black Cat c'était rien pour lui, c'était du théâtre, mais si tu te mets sur son chemin là… Là, il sera prêt à te faire des choses…

J'eu bien du mal à terminer ce discours que je donnais à Dinah, coupée dans mes mots par les sanglots qui montaient toujours plus et semblaient coincer dans ma gorge, coupée par la respiration qui venait à me manquer. Ma voix se faisait toujours plus aiguë et tremblante, impossible pour moi de conserver tout le bouillonnement de mes émotions derrière un masque et même la vapeur des médicaments ne semblait pas assez efficace pour calmer à présent le bourdonnement de mon crâne. Pourtant je continuais mon discours, plaçant chaque mot après l'autre comme si ma vie dépendait de la fin de cette phrase.

Peut être que c'était le cas.

- Je ne veux plus qu'il fasse de victimes… Pas moi, pas toi, pas Ivy ou Selina, pas… Personne! Je m'en fous si je dois pour ça passer pour une criminelle mais je ne veux plus qu'il fasse de victime.

Je me levais finalement de mon fauteuil pour aller à la fenêtre et prendre l'air un instant. Merde… Merde.

Valerie.

Dinah Lance.

La discussion devenait de plus en plus compliquée entre Dinah et moi.

D’une part parce qu’aucune d’entre nous ne parvenait pas à entendre ce que lui disais l’autre et les points qu’elle avançait dans cette discussion, ce débat. Enfin si. Plus exactement, on arrivait bien à s’entendre parce que l’inverse aurait montré un claire problème d’audition (pas non plus que ce ne soit étonnant pour Dinah, cette femme risquait de finir sourde très vite à force de gueuler comme ça) mais c’est juste qu’on arrivait pas du tout à s’écouter, les mots que l’on se jetait pour essayer de raccrocher l’autre à notre projet ne trouvant jamais d’accroche dans l’esprit de l’autre. Sûrement qu’on était trop certaines déjà dans nos positions. Nos esprits têtus n’étant pas trop le genre à être influencé par quelques bons mots, et même ceux d’une copine, alors ils tombaient juste à l’eau. Même Dinah semblait comprendre que parler et débattre ne me ferait clairement pas changer d’avis, et sans toute fois baisser les bras elle commençait à se mettre plus en retrait.

Et puis même moi je n’avais plus l’énergie de débattre de mon projet, c’était trop tard pour ça j’étais déjà certaine de mon choix et quoi qu’elle fasse Dinah n’arriverait pas à me faire changer d’avis. Je respirais lentement, me concentrant sur chacune de mes inspirations en espérant que cela calme l’angoisse qui me torturait actuellement le vendre et m’empêchait d’aligner une phrase complète sans avoir envie de juste fondre en larme comme une adolescente. Tout ce que je demandais c’était son support ou à la grande limite son acceptance, qu’elle m’aide à m’entrainer et me préparer aux combats auxquels je devrais faire face. J’étais juste épuisée, j’avais besoin d’une épaule pour me reposer un peu avant de me préparer à tout ce qui allait m’arriver dans les mois à venir et j’espérais que Dinah puisse être cette dernière. Mais peut-être était-ce trop demander.

- Je sais, je sais… A la vie, à la mort…

Les larmes coulaient le long de mes joues sans que je n’arrive à les retenir mais je faisais de mon mieux pour rester à peu près présentable, je cherchais simplement à ce que leurs larmes ne se transforment pas en full on crise de panique avec ugly cry et tout ce qui allait avec. Je n’avais pas envie de me montrer faible comme ça. Pas que la présence de Dinah ne m’en empêche, j’avais déjà eu des crises de paniques similaires devant elle et elle m’avait offert son réconfort à chaque fois. Mais ce soir… Putain. Ce soir j’aurais aimé me montrer un peu plus forte que je ne l’étais en vraie histoire de lui dire que j’en étais capable de ce combat contre le Joker, qu’elle ne devait pas s’en faire pour moi. Encore une fois je me sentais si faible, si pathétique. Un putain d’échec.

Parfois l’idée me revenait en tête, celle qu’il me disait sans cesse. Que je n’étais strictement rien sans lui. Une incapable.

Dinah posa un bras autour de mes épaules mais ce contact ne m’apaisa pas autant que je ne l’aurais aimé, pas autant qu’il ne le faisait normalement. Mais j’essayais tout de même de m’ouvrir à elle et vins me coller un peu plus contre elle pour profiter de cette étreinte. Et puis plus j’étais proche d’elle, moins Dinah pouvais voir mon regard fuyant sa personne lorsque je lui mentais sans le moindre problème. C’était pour sa propre sécurité. Dinah était une héroïne dans l’arme, toujours prête à se jeter dans le feu de l’action pour sauver la veuve et l’orphelin mais soyons honnête entre elle et moi, si l’une de nous doit se sacrifier pour emporter le Joker dans la tombe ce serait clairement moi. Ça elle n’avait juste pas besoin de le savoir.

- Je le ferais Dinah je te le jure.

Et puis un autre mensonge. Ce que je m’apprêtais à faire, ce chemin de vengeance, me forcerais à lui en dire bien d’autres et à nous éloigner peut-être plus loin encore que nous n’étions avant de devenir des alliées.

- On peut aller manger maintenant ? Je crève de faim et puis j’aimerais bien gouter les spécialités locales tant que je suis là.