Enjoy the Silence [Terminé - Intrigue I]

Le choc. S'il avait porté à la connaissance des initiés que la Justice League s'impliquait une nouvelle fois dans une mission de haute importance, aucun d'entre eux n'aurait pu prédire ce qu'il viendrait se dérouler le soir-même de leur départ le 22 juillet 2020. Lorsqu'elle avait appris le contenu des évènements survenus entre autres dans sa ville natale, cela avait été un véritable choc pour Zatanna. Un timing parfait pour des crimes faisant naître l'horreur dans sa forme la plus pure dans de nombreuses rues. Jamais elle ne put oublier les images du manoir Wayne en proie aux flammes, ni l'annonce de la mort d'Alfred Pennyworth... Des faits qui n'avaient pas manqué de lui serrer le cœur, à propos desquels elle ne pouvait que difficilement imaginer la réaction de Bruce qu'elle espérait voir revenir dans les jours suivants. Un souhait qui ne s'était pas vu être exaucé.

La fuite. Les événements de fin juillet avaient rapidement commencé à remodeler Gotham mais le début septembre de la même année marqua le commencement de radicaux changement pour la magicienne, initié à l'insu de June Moone. Malgré la colère qu'elle éprouvait encore à l'encontre de Constantine, Zatanna ne pouvait décemment pas se résoudre à laisser ainsi l'archéologue en proie à l'entité démoniaque qui la possédait désormais. Mais l'équipe montée avec empressement dans le but de procéder à l'exorcisme connu un funeste destin lorsque le rituel échoua, réveillant Enchanteress qui commis alors un véritable massacre qui ne laissa que deux survivants : John et Zatanna. Et si l'art de s'échapper d'entraves en tout genre n'était pas inconnu de cette dernière, fuir la colère et la soif d'une entité démoniaque était tout autre...
Cela fut éprouvant pour la jeune femme, devant dans un premier temps se remettre de ses blessures, qui devait prendre de nombreuses précautions, qui s'inquiétait pour ses amis à Gotham lorsqu'elle ne se blâmait pas pour les méfaits commis par Enchanteress ou encore lorsqu'elle songeait à Bruce qui n'était toujours pas revenus alors que les mois ne cessaient de s'écouler. Lorsqu'un premier moment de répit se présenta non loin de Gotham, elle avait alors pris la décision de faire surveiller la propriété de Lake Glass où Bruce l'avait un jour emmenée, dans le mince espoir de revoir un jour le Wayne ouvrir cette porte mais aussi avec la crainte que la demeure soit mise à sac.

Le téléphone posé sur la table basse vibra. Deux vibrations succinctes et relativement fortes pour être entendues si l’appareil était rangé dans un sac. Assise en tailleur non loin, Zatanna se tira de sa méditation pour s’emparer de son téléphone et ainsi consulter ce qui avait bien pu lui être envoyé. L’application de surveillance lui signalait une intrusion. Sa respiration se coupa momentanément alors qu’elle appuyait sur la notification pour ouvrir l’application et ainsi observer la courte vidéo qui venait d’être mise en avant. Jusqu’à présent il n’y avait pas eu de quoi s’alarmer et ce soir… ce soir quelqu’un venait bien d’entrer dans Lake Glass House. Sans attendre plus longtemps elle se leva, réajustant la lanière de son jogging puis elle remit ses chaussettes avant de s’empresser d’enfiler une paire de baskets et une veste, prenant ses clés avant de quitter l’appartement…

La demeure se situant dans les environs de Gotham, elle ne pouvait aucunement se permettre de perdre du temps car elle ignorait si l’intrus était venu accompagner d’un comparse et combien de temps il mettrait à commettre son larcin qui serait assurément d’une grande valeur pécuniaire. Elle avait alors fait parler le moteur de sa moto, prenant ses précautions sur le chemin qu’elle devait emprunter, jusqu’à arriver aux abord de la maison où elle se stationna à quelques mètres. Lorsqu’elle coupa le moteur et ôta le casque elle pu entendre les conversations émises par les insectes et autres créatures environnantes cachées parmi les arbres. Commençant à réfléchir aux formules qu’elle pourrait utiliser successivement contre l’intrus, elle s’approcha de l’entrée, ouvrant la porte avec précaution dans l’espoir de ne pas être entendue par celui qui était à l’intérieur.

Une fois la porte déverrouillée, Zatanna avança aussi discrètement que possible, levant ses mains à hauteur de ses épaules prête à utiliser sa magie, longeant le mur jusqu’au salon. Ses yeux avisèrent tout d’abord la cheminée et une bouteille de vin sur la table puis ce ne fut qu’en s’avançant un peu plus qu’elle remarqua les couvertures sur le canapé. Pourquoi un intru voudrait-il… Elle pu terminer sa phrase car un poids l’emporta soudainement et la plaqua contre le mur avec une force qui lui fit brusquement expulser l’air de ses poumons, des mains venant enserrer sa gorge avec une force à laquelle elle ne s’était pas attendue. Sa gorge, sa nuque lui faisaient mal. Son dos était douloureux tandis que ses pieds s’agitaient vainement dans le vide.

- P-pot… tenta-t-elle de prononcer avant que la douleur ne lui coupe la parole. Ses mains vinrent agripper ces poignets qui tenaient bon et ce qui lui paru durer bien longtemps, s’arrêta aussi rapidement qu’il ne s’était produit la voyant relâcher les poignets en retombant sur pieds, toussant puis aspirant l’air à plein poumons. Son prénom fut prononcé. Cette voix… elle la connaissait. Zatanna releva alors subitement les yeux vers l’homme et elle le reconnu.

- Bruce ! s’exclama-t-elle d’une voix éraillée avant de tousser à nouveau. Bon sang, tu pourrais d’abord poser les questions avant de jouer les gros bras ! ajouta-t-elle en massant cette gorge qui venait d’être mise à l’épreuve.

S’était-elle montrée imprudente ? Il s’agissait d’une forte probabilité. Mais quelles avaient été les chances pour que l’intrus ne se trouve pas dans le salon au moment où elle y accédait ? La probabilité que son instinct lui dicte de se cacher quelques temps afin d’observer si le propriétaire des lieux revenait ou non ? S’il était resté dans le salon elle aurait pu user de sa magie pour ne serait-ce que l’immobiliser pour ensuite l’interroger sur la raison de sa présence. Mais non rien ne se passait pour lui faciliter la tâche et rapidement Zatanna se retrouvait plaquée contre le mur.

Si poser les mains sur la gorge d’un adversaire se révélait être une technique logique dans un tel cadre, il s’agissait d’un réflexe heureux pour l’assaillant de la jeune femme qui se retrouvait ainsi dans l’incapacité de prononcer le moindre sort pour lui faire cesser son action. Surprise comme elle l’était, elle ne pouvait que ressentir de la crainte. Etranglée en la demeure de Bruce tandis que nul ne savait où elle se trouvait était une perspective peu engageante pour celle qui essayait désespérait d’aspirer de l’air malgré la pression exercée sur sa gorge.

Alors que sa vision commençait à se brouiller, Zatanna senti la pression se relâcher, lui permettant ainsi de retrouver la dureté du sol sous ses pieds. Si elle ignorait dans l’immédiat la raison pour laquelle elle venait d’être relâchée, l’important était de retrouver sa capacité à respirer, de gonfler à nouveau ses poumons d’air malgré la douleur qui assaillait sa gorge. Mais ce ne fut lorsque l’inconnu s’exprima qu’elle pu connaître son identité. Bruce. Si la crainte était encore présente après ce qu’il venait de se passer, Zatanna fut rapidement submergée par une vague d’émotions qu’elle fut bien incapable de décrypter tant la surprise de revoir ce visage était forte. L’air inquiet qu’arbora Bruce fit se redresser la jeune femme qui cessa de masser sa gorge pour accrocher le regard de son ami. Il n’était guère étonnant qu’il ne se soit pas attendu à une visite à une heure si tardive mais elle était tout aussi surprise que lui. Lui ici après deux longues années d’absence. Elle se pinça les lèvres et alors qu’il s’excusait à nouveau, elle vint lui prendre une main qu’elle pressa tendrement avant de la relâcher lorsqu’il regarda en arrière. Par reflexe elle tenta d’observer ce qu’il pouvait bien regarder puis le regarda à nouveau.

- Oui je… c’était le seul autre endroit en dehors du manoir que je connaissais. Je voulais m’assurer que nul intrus ne viendrait… et je ne voulais pas manquer ton retour, répondit-elle avant de lui adresser un sourire satisfait alors qu’il s’éloignait d’elle pour lui servir du vin. Si dans un premier temps elle hésita à prendre le verre, peu désireuse de consommer de l’alcool à une heure aussi tardive, avant que Bruce n’émette une proposition qui était plus engageante. Probablement pas du café mais au moins du miel ce serait salvateur. Lorsqu’il la regarda à nouveau et qu’il lui avoua être content de la revoir, Zatanna ne pu s’empêcher de venir le prendre dans ses bras poussée aussi bien par la joie de retrouver cet ami si cher à ses yeux que pour s’assurer que son esprit ne lui jouait pas des tours. Moi aussi, Bruce. Moi aussi… dit-elle avant de briser l’étreinte après quelques instants.

- Ne t'embête pas, un verre d’eau chaude et une cuillère de miel me suffiront amplement, répondit-elle enfin avant de l’attirer vers cette cuisine qui n’avait pas été utilisée depuis un bon moment.

Aussi inespérée pouvait être la réapparition de Bruce, Zatanna était soulagée de le voir sain et sauf après que deux longues années s’étaient écoulées sans qu’elle pu entendre parler de lui ou des autres membres de la Justice League. Ce qu’ils avaient vécu alors qu’ils étaient partis sauver le Multivers, elle l’ignorait totalement. Elle ne pouvait imaginer ce qui s’était produit pour affecter à ce point le Wayne mais à moins que la surprise et la joie ne lui embrouillent l’esprit, quelque chose semblait avoir changé en lui. Quelque chose qu’elle n’était probablement pas en mesure de déterminer à cet instant, ni à même de réparer elle-même. Cette pensée fut rapidement rangée dans un coin de son esprit alors qu’ils échangeaient, Bruce venant à l’interroger sur la manière dont elle avait pu apprendre pour « l’intrusion ». Désormais de retour, voilà qu’il ne pouvait s’empêcher de jouer le détective. C’est bien toi… songea-t-elle alors qu’elle lui adressait un sourire satisfait, bien peu gênée d’avoir mis en place un tel stratège nourri par un espoir tout d’abord vain avant qu’il ne soit récompensé de la meilleure des manières… quoi que plus rude dans les premiers instants que ce à quoi elle se serait attendue.

- Merci, répondit-elle simplement avant qu’elle ne soit poussée par cet instinct que bon nombre connaissaient lorsqu’ils retrouvaient un proche après une longue séparation. Ô quelle avait pu être inquiète pour lui et qu’elle était à présent bienheureuse de le retrouver. Sous son étreinte elle senti Bruce se raidir. Aurait-elle dû se retenir d’un tel geste ? Il était trop tard pour revenir en arrière. Mais elle avait besoin de ce contact, elle peu importait l’odeur du sang et de la sueur qui lui parvenaient, et il avait la politesse de ne pas l’éloigner comme si elle n’avait été rien d’autre qu’une inconnue. Lorsqu’elle le relâcha en lui faisant part de sa présence en matière de breuvage, la réaction dont il lui fit part lui arracha un rictus navré. Combien de temps s’était-il écoulé pour lui ? Venait-il seulement d’apprendre la mort d’Alfred et de Jason Todd ? Le cœur de la jeune femme se sera alors qu’elle ouvrait la marche pour rejoindre la cuisine.

Là Bruce se détourna d’elle, commençant à fouiller dans le placard se situant au-dessus du plan de travail. Silencieusement la jeune s’avança et posa son regard devant elle, observant cette vue du lac qui s’offrait à elle. L’eau d’un noir profond reflétait de faible rayons lunaires, une vision plaisante dans laquelle il était possible de trouver l’apaisement pour peur que l’on prenne le temps de s’y arrêter. Non loin d’elle s’affairait le maître des lieux qui préparait ce qu’elle lui avait demandé et alors qu’elle s’était habituée à ce silence, rassurée par la présence de Bruce, elle tressaillit lorsque ce dernier reprit la parole. Elle haussa tout d’abord les épaules avant de lui répondre.

- Je n’ai pas particulièrement faim mais si tu veux que je t’aide à préparer quelque chose, il suffit de me le d… dit-elle avant de se rendre compte qu’il l’observait. Plissant légèrement les yeux avant de hausser un sourcils, elle s’apprêtait à le questionner mais il prit les devants. Tu ne peux vraiment pas t’empêcher de le faire, n’est-ce pas ? dit-elle tout d’abord en secouant légèrement la tête avant qu’un soupir ne quitte sa bouche. Être en sécurité est un bien grand mot en ce moment mais je le suis suffisamment pour être revenue quelques temps à Gotham, répondit-elle avant prendre ce pot de miel non loin d’elle pour en prendre une cuillère, se donnant plusieurs secondes de répit. Tu as tes propres batailles à gagner, je ne veux pas t'en détourner. L'important est que tu sache que j'ai survécu à ces deux dernières années et qu'aujourd'hui je travaille d'arrache-pied pour m'assurer de ne pas perdre une seconde fois... Mais toi Bruce, tu peux me dire ce qu'il s'est passé de ton côté, dit-elle avec détermination avant que voix ne se meuve peu à peu en un murmure alors qu'elle venait de relever les yeux vers lui.

Ils étaient amis et s’ils pouvaient avoir des points communs, ils restaient cependant sensiblement différents dans leur manière d’exprimer leurs sentiments. Il avait mentionné Alfred. Comment lui en vouloir ? Il venait à peine de revenir d’une longue et -sans le moindre doute- dangereuse mission, découvrant ce qu’il avait tant perdu. Alfred avait été cet homme qui avait pris soin de lui à la suite de l’assassinat de ses parents, il avait donc été bien plus qu’un simple majordome au service du Wayne et depuis près deux ans à présent, la terre recouvrait sa dépouille dans le cimetière de Gotham.  Si elle n’ignorait nullement le comportement de Bruce par ce regard jeté vers une présence qui n’était plus, cet air sur son visage et ce mélange d’émotions dévorantes qui se dégageaient de lui, Zatanna n’émit pas la moindre remarque à ce sujet. Que pouvait-elle bien lui dire ? Qu’elle-même avait perdu un être cher, connaissant alors ce sentiment déchirant de rechercher du regard cette présence rassurante qu’avait été son père ? Qu’elle avait espéré qu’il viendrait à elle lors qu’elle avait tenté de le contacter ? Non elle ne pouvait pas le dire, elle devait garder silence et se contenter de lui offrir une présence sur laquelle il pourrait se reposer les yeux fermés.

Prononcée différemment la remarque qu’elle venait de prononcer n’aurait pu qu’être qu’une pique amicale. Être un observateur hors pair dont l’esprit fonctionnait toujours avec une redoutable efficacité était ce qui caractérisait Bruce Wayne et c’était ce qui impressionnait Zatanna depuis ce jour où elle l’avait rencontré. Ce soir ne faisait pas figure d’exception et cela aurait pu la faire sourire en tout autre circonstance que celle-ci. Ainsi lorsqu’il lui répondit la jeune femme se pinça à nouveau les lèvres aussi bien navrée que ce qu’il avait vécu ne lui donnait pas goût à un peu de légèreté mais aussi parce qu’elle s’en voulait de l’amener une nouvelle fois à s’excuser.

- Je t’en pries ne t’excuse plus, je n’aurais pas dû te dire ça, réagit-elle avant de soupirer, se décidant à ne lui révéler que quelques informations la concernant avant de lui dire qu’il pouvait lui parler.

Il poussa vers elle la tasse d’eau chaude et Zatanna y plongea la cuillère de miel puis mélangea consciencieusement l’ensemble pour que le miel puisse se mêler à l’eau chaude sans peine. Je peux. Lorsqu’il prononça ces deux simples mots, si Zatanna retint un fin soupir de soulagement, sa respiration se fit plus discrète. Qu’allait-il lui révéler sur ce qu’il venait de vivre loin de chez lui ? Etait-elle seulement prête à l’entendre ? Venant boire une gorgée de son breuvage, elle ne brisa pas le silence qui s’installa alors que Bruce s’était retourné vers la vision du lac qu’offrait la cuisine, le laissant prendre le temps qu’il voulait avant de s’exprimer. Et lorsqu’il prit enfin la parole, elle l’écouta avec toute l’attention qu’elle pouvait lui offrir à cet instant. La Justice League l’avait donc réellement emporté, mettant à bas les plans destructeurs de Pariah et d’Anti-Monitor. A mesure que les paroles de Bruce lui parvenaient, la jeune femme commençait à imaginer l’espoir se faisant définitivement absent si les membres de la League n’avaient pu revenir dans leur bonne temporalité. Ils l’avaient emporté mais à quel prix ? Dix ans…

- Oh Bruce je… Suis désolée ? Etait-ce que ce qu’elle devait dire même si c’était ce qu’elle ressentait ? Elle ferma ses paupières et secoua légèrement la tête. Elle ne pouvait que peu imaginer ce qu’il avait vécu et ses mots ne sauraient décemment apaiser son esprit, aussi fort soit-il. Lorsqu’il reprit elle se mordilla la lèvre, elle avait voulu se concentrer sur lui, elle en avait trop dit sur elle et à présent il la questionnait à nouveau. Elle prit une nouvelle gorgée d’eau afin de s’éclaircir la voix, se laissant quelques instants pour trouver les bons mots et de ne pas aborder John –Pas maintenant- avant de lui répondre.

- Je me trouvais à Seattle quand le jour-même de votre départ, des attaques ont été menées à Gotham, Metropolis et Starcity, allant jusqu’à viser les institutions et inviter le crime organisé à prendre le contrôle. C’est le lendemain que.. le manoir a été incendié et qu’Alfred a été… assassiné Je sais que j'aurais dû agir dans le mois qui a suivi mais je ne pouvais pas laisser une entité démoniaque s’en prendre à des innocents. Avec des spécialistes j’ai voulu procéder à un exorcisme mais nous avons réveillé l’entité et si je m’en suis tirée avec des blessures dont je porte aujourd’hui les cicatrices, mes camarades l’ont payé de leur vie. J’ai fuit et elle m’a traquée pendant de nombreux mois… Plus le temps passera, plus va faire des victimes et gagner en puissance… J’ai tout bonnement été incapable de sauver cette pauvre June Moone et je cherche quels soutiens je pourrais obtenir pour cette fois l'emporter…

Derrière l’assurance qu’elle exposait au regard des autres se cachait chez Zatanna cette femme sensible qui exprimait aisément ses sentiments. Il lui avait alors fallut rapidement faire preuve de détermination pour qu’au prix de nombreux effort, elle puisse être à même de gérer cette sensibilité qui était la sienne. Malgré cet apprentissage, chaque jour était un travail sur elle qui devait être mené à bien afin que son esprit ne vienne la tourmenter durant bien des jours et des nuits. Un équilibre précaire qu’elle contrôlait et pouvait se brisait lorsqu’elle se heurtait à des difficultés qui lui faisaient perdre cette maîtrise. Rares étaient ces difficultés à présent mais lorsqu’elles survenaient, elle se retrouvait submergée sous des vagues d’émotions parfois contradictoires. Ce qu’il s’était passé avec John lui avait fait nourrir une réelle colère à son encontre d’avoir été ainsi abandonnée, de n’avoir été vue qu’en tant que passade, elle s’était même interrogée un temps sur ses propres torts en cherchant à savoir ce qui avait bien pu le pousser à s’en aller et il fallut que l’on vienne à son secours pour qu’elle ne s’enfonce pas dans une certaine détresse. Elle connaissait donc l’importance que revêtait une aide apportée par quelqu’un bénéficiant de sa confiance.

En l’écoutant s’exprimer, la jeune femme ne pouvait que difficilement imaginer l’entièreté des faits auxquels il avait été confronté. Il se confiait à elle et s’il ne devait probablement pas lui donner tous les détails, il était suffisamment expressif pour que ses traits comme son regard puissent donner un aperçu de ces petites lignes qu’il ne lui révélait pas. Même s’il avait accompli sa mission, sauvant le monde d’une catastrophe, il n’en restait pas moins que Zatanna aurait souhaité qu’il soit épargné de ces affres. Elle était désolée pour lui mais il avait raison, elle n’y était pour rien. Une fois qu’elle lui eut répondu à ses premières questions, il prit le contrôle de leur conversation en cherchant à en apprendre plus et elle détourna légèrement le regard vers le lac avant de poser à nouveau son regard sur lui.

Alors qu’elle expliquait les premiers évènements survenus après le départ de la Justice League, Zatanna observait avec une certaine appréhension les réaction que Bruce pouvait afficher sur son visage. Il savait ce qu’il s’était passé mais l’entendre de vive voix semblait l’affecter, il détourna la tête lorsqu’elle mentionna Alfred, finissant par serrer les mâchoires. La jeune femme s’attela à poursuivre même évoquer Enchanteress réveillait le souvenir de leur rencontre, la douleur des blessures, la peur alors qu’il avait fallut fuir. Lorsque Bruce braqua de nouveau son regard sur elle, une lueur intense dans les yeux, elle se figea. Il savait qu’elle ne se trompait pas et pourtant il voulait qu’elle le lui confirme. Hochant simplement la tête en guise de réponse, elle prit une nouvelle gorgée de sa boisson. La chaleur de l’eau et le goût du miel lui faisaient du bien, venant apaiser quelque peu son esprit alors que Bruce s’excusait.

Elle sentit une main, celle de Bruce, venir prendre la sienne. Cette pression exercée, cette caresse accordée… Elle ne se serait pas attendue à ce qu’il se permette ce geste mais elle le prenait sans songer au moindre refus, par un geste il tentait de lui montrer son soutien. Posant le verre sur le meuble juste à côté d’elle, Zatanna secoua légèrement la tête et soulevant légèrement son t-shirt elle vint poser la main de Bruce sur cette cicatrice qui barrait son flanc -une parmi d’autres qui barraient aussi bien son abdomen que ses jambes-. Donner plus de détails sur cet épisode, c’était ressasser d’autant plus ce douloureux souvenir qui l’assaillait déjà depuis des mois.

- Je ne me sens pas capable d'en parler plus, ce qu’il s’est passé m’a marqué aussi bien dans l’esprit que dans la chair et je ne veux pas avoir à prononcer son nom à nouveau. Sa raison d’être est le pouvoir en dominant le monde, tu peux en parler aux autres mais ce combat est pour les gens comme moi, j’ignore s’ils sauraient convaincre mes contacts de se lancer dans une telle entreprise mais plus le temps passera plus j’aurai du sang sur les mains pour avoir échoué la première fois, répondit-elle avant de relâcher sa main. Je connais de nombreux magiciens, certains ont une moralité qui me fait douter sur la faisabilité d'une association avec eux mais leurs capacités et puissance seraient des atouts non négligeable. S’ils ne répondent pas à mon appel, je vais devoir partir pour aller les chercher.

L’exorcisme qui avait échoué. Le bain de sang causé par une Enchanteress prenant le contrôle de son hôtesse. L’échec. La douleur. La fuite. Tout cela avait affecté Zatanna aussi bien physiquement que psychiquement au point que sa confiance en elle l’avait quitté, lui rendant incapable d’user de sa magie durant des jours si ce n’était des semaines. Retrouver ses pleines capacités lui avait probablement prit autant de temps qu’il n’avait fallut à son corps pour cicatriser de ce combat si déséquilibré, et sans aide elle aurait probablement rejoint son père de l’autre côté bien plus rapidement qu’elle ne l’aurait cru.

Lorsqu’elle se saisit de la main de Bruce pour la poser sur cette cicatrice qui barrait son flanc, elle avait autant besoin de lui montrer quel point elle avait pu être marquée que d’un contact avec un ami dont elle avait espéré le retour durant deux longues années. Si dans les premières secondes le contact du grain de la peau du Wayne sur la cicatrice lui paru désagréable, la chaleur effaça peu à peu l’étrange sensation tandis qu’elle s’expliquait sur son refus de lui en dire plus. De ne plus avoir à prononcer le nom d’Enchanteress pour ne pas lui accorder une importance avant ce moment où elle viendrait à elle pour en venir à bout. De ne pas détailler ce que son esprit lui faisait imaginer sur le sort d’êtres doté de magie comme elle qui pouvaient subir le même sort que Rachel Roth. Il y avait tant à penser, tant de livres à rouvrir et étudier pour trouver une solution, des contacts à retrouver pour tenter de les convaincre de lutter contre l’entité démoniaque. Elle ne pouvait pas se permettre de ressasser une fois de plus ce corps s’écroulant un à un autours d’elle sans la moindre once de vie.

- Je m’y efforce mais j’ai la conviction que la nommer la renforcerait et je ne souhaite pas le faire avant de la croiser à nouveau pour lui faire payer ce qu’elle m’a fait, répondit-elle avant que Bruce ne retire sa main avant de tourner le dos au lac, un air de réflexion venant assombrir quelque peu ses traits. A quoi pouvait-il bien songer ?

Silencieuse, Zatanna reprit son verre et en bu le contenu avant de s’approcher de l’évier pour le nettoyer. Ouvrant le robinet l’eau tiède se mit à couler et mettant un trait de liquide vaisselle sur l’éponge, elle humidifia cette dernière et nettoya le verre, laissant ainsi à l’esprit de Bruce tout le temps nécessaire afin de procéder à sa réflexion avant qu’il ne l’exprime de vive voix. Quand il le fit, la jeune femme se figea un instant. John. Réfléchir, trouver des solutions à des problèmes, tel était le Bruce qu’elle connaissait et qui se montrait encore présent ce soir. Si elle n’avait pas fait de nouveau la rencontre de John deux ans, elle aurait probablement montré de cette colère qu’elle avait gardé après son départ… mais s’il ne l’avait pas trouvé elle n’aurait probablement pas fait face au danger dans l’immédiat mais probablement dans les mois suivants, seule. Retrouvant sa mobilité, elle rinça le verre avant de le poser juste à côté de l’évier, essorant ensuite l’éponge pour ensuite retirer l’excédent de mousse sur sa main en la passant sous l’eau. Ce ne fut que lorsqu’elle coupa l’eau qu’elle lui répondit.

- C’est John qui est venu à moi pour combattre cette entité démoniaque et c’est lui qui m’a aidée par la suite. Il fait ce qu’il peut avec ses propres contacts, répondit-elle avant de prendre un torchon pour s’essuyer les mains. Et si je ne tiens pas à te dédire de tes propres obligations de justicier, je ne te dirais jamais non pour que tu m'apportes ton aide !

Enchanteress représentait le plus gros échec qu’elle ait connu jusqu’à présent, qui l’avait blessée, qui lui avait fait perdre confiance en elle et ses capacités. Le chemin avait été long pour se reprendre et même si elle éprouvait encore la difficulté à parler avec exactitude des évènements qui étaient survenus, elle était déterminée à ne plus se laisser battre par l’entité démoniaque. Bruce était le mieux placé pour comprendre ce qu’elle pouvait ressentir sur ces difficultés à supporter un échec aussi lourd de conséquences, à travailler dur pour que cela ne se reproduise pas à l’avenir et empêcher des dommages collatéraux.

- J’aurais aimé pouvoir trouver conseil auprès de lui mais je n’ai pas à l’invoquer et risquer de ne pas obtenir de réponse. Je me débrouillerai avec les autres magiciens qui accepteront de m’épauler, répondit-elle avant qu’un soupir ne quitte sa bouche.

Silencieuse, elle alla nettoyer son verre désormais vide tandis que Bruce abordait le sujet de John. Une fois de plus il montrait que son esprit était toujours affuté, toujours à tourner à plein régime afin de trouver les meilleures solutions aux problèmes auxquels il faisait face, toujours un grand détective. Toujours le Chevalier Noir de Gotham.

- Même si je doute que les humains soient les plus exposés, tu fais bien. Il ne faudrait pas qu’ils servent de moyen de pression… répondit-elle après avoir hoché la tête.

En parler au reste de la Justice League, permettrait d’avoir de nombreux appuis de taille lorsqu’une nouvelle confrontation se présenterait. La première fois, la magie manquait. La seconde, la puissance. S’ils réussissaient à allier les deux en ayant trouvé la meilleure solution pour sauver June Moone, alors ils auraient une chance de l’emporter. Et l’emporter signifiait aussi prendre les mesures nécessaires pour ne pas être détournés de cet objectif, d’empêcher l’ennemi d’avoir accès à leurs faiblesses. Un long silence s’installa et lorsque Bruce reprit la parole, ce fut pour remercier Zatanna. Cette dernière lui adressa un sourire.

- C’est normal, dit-elle avant qu’il ne lui pose une nouvelle question. Je n’ai pas été en contact avec beaucoup d’entre eux. Je sais que Rachel Roth a été tuée l’an dernier par Enchanteress et un tireur a eu raison de Supergirl. Pour ce qui Dick et de… Tim je ne me trompe pas, ils vont bien je te le promets, nous nous sommes récemment entraidés sur une affaire d’élixir magique. Et Selina… Selina se trouve là où ses intérêts sont les plus garantis, actuellement ce n’est pas du côté des justiciers et elle a fait fortune.

Elle pouvait de toute manière répondre avec exactitude à ses questions, elle savait qu’il effectuerait lui-même des recherches parce qu’il avait besoin de rattraper ces années écoulées et d’établir une stratégie à suivre. Tel était Bruce Wayne. Ainsi était Batman. Elle le savait proche de Selina, il fallait donc qu’il aille la voir… en restant aussi discret que possible tant le centre-ville était devenu dangereux et ce même pour ceux qui étaient entraînés au combat depuis des années.

Aussi affecté par l’expérience qu’il venait de vivre durant ce qui lui avait dix infernales années, Bruce restait à l’écoute et de bon conseil même s’il ne lui imposait rien. Nul ne méritait de perdre ses proches comme cela était le cas pour lui. Ces épreuves l’avaient forgé mais dès leur première rencontre elle avait su quels démons guettaient l’âme de celui qui était devenu par la suite le Batman, le chevalier noir de Gotham. Combien de temps y résisterait-il encore ? Son combat dans un autre univers l’avait épuisé, ses traits étaient si marqués. La mort d’Alfred et de Robin devait avoir fissuré cette muraille qu’il s’était bâti pour son propre bien. Il l’écoutait attentivement sans l’interrompre alors qu’elle lui avouait ne pas avoir osé invoquer l’esprit de son père. Il était en paix et elle avait craint de ne pouvoir obtenir de conseils de sa part. Elle devrait se débrouiller seul, au côté de John, pour convaincre d’autres magicien de l’aider face à Enchanteress et de trouver auprès d’eux la meilleure solution pour en venir à bout. Pour ne pas risquer la sécurité de leur monde, menacé par cette entité avide de pouvoir et d’une puissance sans commune mesure.

Si elle avait déjà rencontré Superwoman et Wonder Woman… La question surpris la jeune femme. Un homme et une femme dont l’humanité était plus manifeste qu’en certains humains, dotés de pouvoirs qui attisaient la curiosité et l’admiration de Zatanna. Elle avait déjà rencontré mais elle n’avait guère été plus loin dans une conversation avec eux, leurs enjeux se trouvant jusqu’à présent à des échelles bien différentes. Mais si l’un comme l’autre pouvait lui apporter une vision neuve sur cette problématique qui planait au-dessus de sa tête depuis des mois, alors elle était prête à les trouver pour échanger avec eux. Si Enchanteress n’était pas arrêtée au plus tôt alors sa menace dépasserait les frontières américaines pour s’étendre au reste du monde et probablement plus loin encore.

- Oui mais rien d’informel. S’ils ont du temps à m’accorder, j’aimerai savoir s’ils ont détecté des faiblesses qui m’ont échappées et s’ils sauraient quoi que ce soit qui puisse m’être utile, répondit-elle avant de poursuivre en lui parlant de ce qu’il était advenu des autres, abordant la mort de Rachel sans songer au fait que Bruce ne la connaissait pas, point qu’il lui fit remarquer lorsqu’il lui demanda qui elle était. Zatanna se mordilla la lèvre, elle aurait dû être plus précise dès sa réponse, elle aurait ainsi épargné au Wayne de lui poser la question. Rachel, ou Raven pour son alias, était connue parmi les magiciens et occultistes pour être la fille de Trigon, un des démons les plus puissant qui puisse exister, et d’une humaine. Elle était très puissante. Enchanteress est avide de pouvoir, au sens propre comme au figuré, et Rachel représentait une proie parfaite pour elle pour obtenir plus de puissance, expliqua-t-elle avant que les yeux plissés de Bruce se lui fasse planer le silence, la laissant l’observer se frotter le menton.

Qu’est-ce que son esprit lui soufflait en cet instant ? De nouvelles questions allaient sans le moindre doute être posées, il était doté d’un esprit d’enquêterait il ne pouvait en aller autrement… ou alors il avait beaucoup changé. Lorsqu’il reprit la parole, la jeune femme se figea tout d’abord avant qu’elle ne croise les bras sur sa poitrine.

- Que veux-tu dire par-là ? Que j’ai besoin d’un chaperon pour me charger d’un éventuel cambrioleur ? Ou qu’en toute circonstance je dois être accompagnée ?  demanda-t-elle tout d’abord, un sourcil haussé avant de s’avancer pour se poster près de Bruce. Il n’avait pas tort, la prudence était nécessaire mais l’idée de devoir être chaperonnée en toute circonstance ne lui plaisait guère. John est... tu sais que s’il veut aller quelque part nul ne peut l’en empêcher. Pour ce qui est de ce soir, j’avais besoin d’être seule alors j’étais dans mon appartement du centre-ville. Shadowcrest est si grand quand on est seule... As-tu besoin de savoir quelque chose d’autre ? reprit-elle d’un ton plus doux.

Vivre tandis qu’un compte à rebours avait été lancé n’était guère une chose aisée. Le Temps était comme un sablier géant dans lequel elle s’était retrouvée prisonnière dès lors qu’Enchanteress s’était éveillée pour laisser exploser toute sa rage. A chaque grain de sable qui tombait, Zatanna avait la sensation de sentir un peu plus le souffle de l’entité sur sa nuque alors même prenait les mesures nécessaires afin d’être la plus discrète possible. Combien de temps cela durerait-il encore ? Pourrait-elle continuer ainsi des mois durant ? Elle l’ignorait et quand même la crainte pouvait lui tordre le ventre, elle ne pouvait pas tout abandonner et vivre cachée jusqu’à la fin de ses jours.  Elle prit une profonde inspiration. L’aide d’êtres expérimentés tels que Superman et Wonder Woman pouvait lui apporter un savoir qu’elle ne possédait pas encore et dont l’utilité ne se vérifierait que lorsque qu’ils le lui auraient transmis. Si elle ne voulait pas les détourner d’une quête plus grande encore que le péril que représentait l’entité, s’ils possédaient des connaissances elle voulait les entendre et ce peut-être importe les heures que cela pouvait lui prendre. Il fallait qu’elle soit prête et qu’à sa prochaine rencontre avec Enchanteress, elle ne connaissance la défaite.

Silencieuse. Zatanna hocha la tête tandis que Bruce lui donnait de plus amples informations. Dans l’immédiat des connaissances sur l’espace et la Terre n’était pas ce qu’elle recherchait mais peut-être existait-il un être puissant à même de l’emporter sur Enchanteress ? Mais Wonder Woman… La jeune femme braqua à nouveau son regard sur le Wayne alors que le nom de Circé flottait dans son esprit. L’Amazone pouvait effectivement lui apporter des précisions sur bien des récits et écrits se transmettant au sein de la communauté des homo magi. Elle décrocha son regard de celui de Bruce. Le cas de Rachel Roth compliquait drastiquement cette tâche d’ores et déjà bien ardue car si absorber des pouvoirs pour engranger de la puissance pouvait prendre du temps, le faire sur une jeune femme mi-démone mi-humaine avait dû considérablement la renforcer et accroître sa soif. L’avidité. Une vice qu’elle avait vu de bien trop près et qu’elle n’aurait cru revoir de sitôt après que John soit venu la chercher pour qu’ensemble ils aident une innocente : June Moone. A nouveau elle hocha la tête, faire ce qui était nécessaire : voilà ce à quoi elle devait songer pour réussir.

A la suite des paroles de Bruce, la magicienne cru piquer un fard tandis qu’elle croisait les bras sur sa poitrine. Encore et toujours des questions mais la dernière qui venait d’être prononcée concernait John. Où il était… Dans un bar ? En Angleterre ? Elle l’ignorait totalement et ils avaient convenu après leur défaite que se séparer serait pour le mieux. Si elle commença à répondre de manière quelque peu abrupte, sa voix finit par prendre un ton plus doux même si son sœur battait la chamade, signe que malgré tout parler du natif de Liverpool ne la laissait pas de marbre. Oui il avait ses compétences, elle avait les siennes, et par le passé ils avaient fait équipe. La dernière en date les avait vu se quitter en piteux état alors complémentarité n’était pas un mot qui lui venait à l’esprit dans l’immédiat à la mention de ce nom. Pour seule réponse elle lui adressa un bref et léger sourire avant de se pincer les lèvres. Être entourée pour ce combat. Il fallait qu’elle le soit mais dans l’immédiat sa solitude n’était comblée que par les livres et vieux parchemins de la bibliothèque du manoir familial.

Lorsque Bruce vint lui prendre la main, venant la caresser du revers du pouce avec une certaine douceur, Zatanna tressaillit. Le regard plongé dans celui du Wayne qui était venu accrocher le sien, elle senti sa gorge se serrer alors que la question resonnait dans son esprit avec une force insidieuse. Comment allait-elle ? Une question à laquelle elle n’aurait aimé répondre qu’au fantôme de ce père qu’elle n’avait pas osé invoquer, craignant que cette forme d’égoïsme ne vienne tous deux les affecter. Mais elle pouvait faire confiance à Bruce, lui qui était venu apprendre auprès de Zatara. Posant sa main sur la sienne, faisant cesser ce mouvement qui embrumait son esprit, elle lui répondit.

- J’ai peur, Bruce. Peur de ne pas trouver la solution suffisamment rapidement et de voir les corps s’amonceler à cause de moi. Chaque jour j’occupe mon esprit dans mes recherches parce que je lutte contre moi-même. Ma défaite a tant ébranlé ma confiance en moi que durant des semaines j’ai été incapable de me servir de ma magie… Je crains que cela se produise à nouveau et de ne pouvoir rien faire si je croise à nouveau sa route. Voilà comment je vais et pourquoi j'ai besoin de parler avec quiconque pouvant m'apporter une piste, aussi insignifiante soit-elle.

La défaite face à Enchanteress l’avait mise à nue, venant briser en un claquement de doigt cette armure qu’elle s’était forgée au fil des années, et aujourd’hui le temps lui permettait de redresser ses défenses. Mais il restait toujours cette sensibilité qui prenait différentes formes ainsi, se confier de la sorte à Bruce en conservant un ton égal relevait du miracle plutôt que de la réussite. Elle avait toujours admiré sa capacité à se détacher de ce qu’il voyait et en cet instant c’était probablement ce qui inspirait Zatanna à s’exprimer ainsi. Se confier sur cette peur d’échouer, sur cette honte d’avoir été ébranlée de la sorte et de n’être devenue qu’une simple humaine en fuite durant plusieurs semaines. Supporter ses propres failles durant plus d’un an sans avoir quiconque sur qui compter pour se reposer, rester déterminée à prendre sa revanche n’était pas une tâche facile mais chaque jour elle s’y attelait et il fallait qu’elle prenne contact au plus vite avec des magiciens de confiance. Il fallait qu’elle parle aussi à John de cette voie à prendre, l’exorcisme ayant échoué, la magie restait leur meilleur atout face à la puissance de cette démoniaque divinité qu’était Enchanteress.

Sa main sur celle de Bruce, elle avait fait stopper le mouvement de ce pouce qu’elle avait senti la déconcentrer, ce dernier retira la sienne avant commencer à répondre aux paroles qu’elle venait de prononcer. Il avait beau être solitaire, il n’abandonnait pas ceux qui en avaient besoin et offrait une oreille parfaitement attentive, ce que la magicienne appréciait grandement chez lui avec sa soif de justice. Il connaissait la peur depuis des années et Zatanna savait depuis ce jour où il était venu voir son père quels étaient les démons qui étaient son âme, et jusqu’ici il s’attelait à lutter afin de poursuivre sa quête. La peur pouvait aussi bien pétrifier que donner une force nouvelle. Il savait ce dont il parlait et la jeune femme ne pouvait que l’écouter à ce propos. Croisant doucement les bras sur sa poitrine, elle l’observa se retourner vers le lac alors qu’il poursuivait sa tirade. Elle prit une grande inspiration et la retint quelques instants alors qu’il la complimentait ; sentant sa gorge se serrer elle détourna son regard pour l’accrocher momentanément sur le meuble non loin mais lorsqu’elle senti Bruce se retourner vers elle, elle ne pu s’empêcher d’accrocher à nouveau son regard.

Vaincre. Elle n’avait pas le choix, c’était la seule issue acceptable pour elle et il avait raison de le lui affirmer. Pratiquer la magie, ce n’étaient pas simplement ses représentations sur scène. Ce n’étaient pas que ses recherches d’objets occultes à travers le monde ou d’une quête de savoir. C’était aussi se confronter à des magiciens comme Nick ou encore Huan, c’était se confronter à des démons ou des puissances comme Enchanteress. Elle expira doucement alors que Bruce terminait, l’encourageant à s’entourer de ceux qu’elle jugeait en adéquation avec son combat, la tirant vers cette lumière qu’elle se devait de comprendre.

- Je ferais ce qu’il faut pour protéger ce monde des menaces occultes Bruce, sois en assuré. Quant à toi, relève-toi une fois de plus et poursuis ton combat. Tous ces gens méritent à nouveau de connaître un espoir qui leur a été enlevé le soir de votre départ, tu as été une inspiration pour eux et tu peux encore l’être malgré la peine qui t’habite et la colère qui te guette, dit-elle avant de laisse s’échapper un soupir de soulagement. Est-ce que je peux t’être d’une aide particulière ? A moins que tu préfères rester seul ? Maintenant que je suis rassurée que tu sois rentré, je ne veux pas m’imposer.

Des évènements de l'ampleur qu'ils avaient connus ne pouvaient qu'irrémédiablement les avoir changés, à des degrés différents mais il ne pouvaient qu'avoir eu un impact sur eux et ce même si les blessures physique avaient pu guérir.  Zatanna était venue jusqu'ici ce soir car durant ces deux dernières années elle avait eu l'espoir que Bruce revienne, elle s'était inquiétée qu'un introduit puisse s'introduire chez lui tout en espérant qu'il s'agisse de Bruce lui-même. Elle ne s'était pas trompée mais que faire à présent qu'elle savait qu'il était revenu ? Devait-elle rester et lui apporter toute l'aide dont il aurait besoin, en hommage au temps que Zatara avait consacré au jeune Wayne de l'époque ? Ou devait-elle le laisser seul avec ses pensées, ses démons, car elle n'était peut-être pas la mieux placée à cet instant précis ? Si elle ignorait la réponse à ces questions, son instinct lui dictait qu'elle devait se montrer présente pour lui et ce même s'il ne la considérait peut-être autant comme une amie qu'elle ne le considérait comme tel.

Le contact de la main de Bruce sur la sienne avait été doux mais imperceptiblement elle l'avait senti venir tirer son esprit de sa concentration, éveillant des souvenirs de jeunesse qui n'avaient plus lieu d'être : elle devait se concentrer sur cette mission qui était désormais la sienne et Bruce devait penser à sa propre mission, à Selina. Elle accueillit avec détermination et un certain soulagement les mots encourageants du Wayne qui lui permettait de s'ancrer dans une réalité où si elle avait des faiblesses, des peurs, elle avait des forces dont elle pouvait se servir pour réussir. Regain de force, lui permis d'à son tour de trouver les mots pour montrer à Bruce qu'il avait encore toute sa place pour protéger Gotham, pour guider ceux qui en avaient besoin. De cette figure effrayante de cape vêtue, il était aussi ce protecteur qui venait combattre le crime, qui apportait une certaine lumière dans la nuit la plus noire.

Au beau milieu de nulle part, au beau milieu de la nuit. Lorsque Bruce reprit la parole, ses mots arrachèrent l'ombre d'un sourire à Zatanna. Elle pouvait tout à fait faire la route complète sur sa moto mais elle pouvait tout autant ouvrir un portail à l'extérieur, ce qui ne devait probablement pas effleurer l'esprit du héro qui avait bien des choses sur lesquelles se concentrer. Elle se contenta cependant d'hocher la tête alors qu'il lui annonçait où elle pouvait trouver une chambre de libre, détournant son regard de lui pour regarder la direction qu'il lui indiquait mais ses yeux se posèrent à nouveau sur lui.

- Ca... ? Ne veux-tu pas dire Selina ? dit-elle avant de secouer légèrement la tête. Navrée... Merci et tu devrais t'occuper un peu de toi ce soir, tu... tu saignes ?! Elle haussa un sourcil. Deux possibilités s'offraient à elle : il était revenu directement ici, blessé, ou il avait atterrit ailleurs dans Gotham et n'avait pu s'empêcher d'enfiler à nouveau le costume. Si elle penchait instinctivement pour la seconde possibilité, l'information importante restait qu'il était blessé et qu'elle avait la possibilité de le soigner. Venant poser ses mains sur cette épaule blessée afin de ne pas lui laisser la possibilité de se soustraire, elle prit de nouveau la parole. Ne bouge pas... sirueG ! ordonna-t-elle tout d'abord avant de laisser libre cours à sa magie et il ne fallut que quelques instants pour que les lésions subies par Bruce ne soient plus qu'un souvenir dans son esprit. Assurée qu'elle ne lui ferait pas mal, elle lui tapa avec douceur sur l'épaule et puis elle lui adressa un nouveau sourire. Je suis sincèrement ravie que tu sois revenu Bruce, nous avons beau avoir nos secrets tu as toute ma confiance... Repose-toi tu en as besoin. Quant à moi, je vais essayer de ne pas me perdre jusqu'à la chambre, ajouta-t-elle avant de s'éloigner de lui et de se diriger vers la chambre qu'il lui avait indiqué.