@"Selina"Hey Babe!
Je suis rentrée à Gotham.
T'as surement une grosse soirée de prévue. On se voit demain? Tu me manques.
[ENVOYE LE 07/12/2022 - 07.02PM]
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Madame ?! Levant le nez son téléphone, brutalement sortie de ses rêveries et pensées, Helena croisa le regard du chauffeur de taxi par le biais du rétroviseur interne du véhicule. Jusqu’alors bercée par le seul bruit du moteur, des essuis glace à pleine vitesse et de la pluie battante sur les carreaux de la berline, elle avait laissé son esprit vagabonder. Une habitude qu’elle ne devait pas prendre. Mais résister au doux appel léthargique des anti-douleurs était compliqué, surtout avec la dose qui parcourait ses veines.
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Madame ? On est arrivé. Cathedral Square. Vous ne voulez pas que je vous dépose à l’abris ? Avec ce temps vous allez être trempée avant même d’avoir pu faire un pas dehors.
L’immense place de la Cathédrale de Gotham était plongée dans une pénombre inquiétante. Derrière l’épais rideaux de pluie, seul l’immense masse sombre de l’édifice religieux se détaché réellement, écrasant les bâtiments alentours de son imposante masse. Helena ne connaissait que trop bien ce parvis, chacune des pierres qui formait l’immense arche d’entrée, chaque saint ornant ses murs presque cyclopéens. Encore une fois elle allait passer ses arches gothiques. Encore une fois elle allait demander pardon.
Rangeant d’un geste rapide son téléphone dans son sac à main, elle en sorti deux billets verts à l’effigie de Benjamin Franklin. Se redressant péniblement dans le craquement caractéristique du cuir de la banquette arrière, elle les agita un instant au nez de son chauffeur.
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C’est gentil, mais c’est parfait ici. Deux cents Dollars et vous m’attendez ici une heure, maximum... Et je vous paye la course suivante, bien entendu. Deal ? Les yeux du jeune homme qui lui servait de chauffeur brilla un instant, hypnotisé par le regard du Père fondateur qui le toisait depuis son support de papier. Gotham était ainsi faite. L’appel du billet vert était toujours le plus fort.
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A ce prix-là je peux même vous ouvrir la porte Madame ! Helena sourit un instant à la réponse du pauvre homme face à elle. Un gars honnête très certainement, qui se tuait à la tache douze heures par jours pour un salaire de misère. Le genre de personne à vivre sur la ligne de crête, cette frontière ténue, souvent floue, entre le travail honnête, mal payé et mal considéré et quelques choses de plus sombre et de plus facile, au risque d’y laisser son âme. Au moins, avec ces quelques billets, elle lui permettait de faire au moins un pas du bon côté de cette ligne. Vain espoir... Gotham restait Gotham. Mais cela valait la peine d’essayer, quitte à tenter le
diable.
Empochant les billets, le chauffeur s’empressa de sortir sous la pluie battante pour aller lui ouvrir la porte, prenant même le temps de déployer un parapluie. Ce geste, aussi anodin qu’intéressé, lui rappelait un temps lointain où un portier ouvrait sa porte à une toute jeune demoiselle. Un temps bénit, éloigné de la violence de ce monde.
Les minutes défilées comme des heures.
Dans l’immense maison de Dieu, sous le regard inquisiteur des saints et des vitraux, Helena patientait, assise seule, sur un des nombreux bancs de bois capitonné positionnés sous la nef de la Cathédrale. Un silence macabre occupait l’espace, à peine troublé par le son de la pluie et le lointain son de l’orage qui commençait à gronder au-dessus de Gotham. La Sicilienne n’était pas ce que l’on pouvait appeler une personne pieuse, ou pratiquante. Mais elle ne manquait jamais ce rendez-vous, après chaque “mission”. Une manière de sauver son âme, si tant est qu’elle existe, de se rassurer et de demander pardon.
Mais cette fois, c’était différent.
Les lèvres pincées, le visage fermé, la tueuse n’était pas là pour trouver un quelconque pardon de la part d’une divinité ou d’un saint. Elle était là pour se pardonner elle-même. Ses jointures étaient blanches, ses doigts serrés sur le chapelet qu’elle portait au poignet depuis sa communion, presque trente auparavant. Seul une quantité bien trop importante d’opiacé dans le sang l’empêchait d’exploser de rage contre elle-même. Machinalement, elle récitait à demi-mot un énième “
Padre Nostro” puis “
Ave, O Maria”.
Le bruit d’une porte de bois se fermant derrière elle fut le signale pour qu’enfin elle trouver une forme de paix intérieur. Pour que quelqu’un l’aide dans cette tache bien trop immense pour elle seule.
Le bruit mat de la trappe de confession s’ouvrant sonna le départ du processus. Seulement ainsi elle pouvait se regarder dans le miroir sans honte. Un raclement de gorge familier, de l’autre côté de la grille de bois, signala à la pénitente qu’il était disposé à l’écouter. Helena prit un instant pour parcourir du bout des doigts les perle de son chapelet, avant de se lancer.
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Pardonnez moi mon Père, car j'ai péché. Je ne me suis pas confessée depuis ... depuis plusieurs mois, au moins...Le bruit de déglutition qu’elle entendit de l’autre côté du confessionnal était teinté d’un stress certain. Un bruit qu’elle ne connaissait que trop bien. La triste musique de l’appréhension.
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… Je vous écoute ma Fille… Les voitures défilaient à grande vitesse autour d’elle. Le moteur de sa
Triumph rugissait avec fracas alors qu’elle slalomait entre les véhicules, sur les traces de sa proie. Il ne lui en restait plus beaucoup, trois pour être précis. Les trois derniers participants au
massacre des Bertinelli, bientôt trente ans auparavant. Le dernier encore présent à Star-City était maintenant à sa portée.
Vitali Drazic, dit “
Le Serbe”. L’ancien chauffeur de
Galante. Celui-là même qui avait conduit la toute jeune et innocente Helena jusqu’au ce qui aurait dû être son échafaud, lui faisant croire qu’il remplacer son chauffeur habituel, absent pour car “
fiévreux”. Un doux euphémisme pour un parler d’une balle dans le crâne à une enfant de dix ans. Un homme qui s'était gavé de l'argent de sa famille. Ce
porc qui était maintenant à la tête d'un des plus gros trafique d'être humain du Pacifique Nord... Plus pour longtemps.
Les bornes et les lampadaires de l’
Interstate 12, le long du Pacifique, s’enchainaient à un rythme effréné. Derrière elle, les lumières de la Skyline de Star-city s'éloignaient peu à peu. Les klaxons et les appels de phares n’y faisait rien. Elle devait continuer. Une centaine de mètres en avant d’elle, la
Maserati du “
Serbe” essayait de se frayer un chemin dans la circulation à toute vitesse elle aussi, fuyant son destin implacable. Il savait
Huntress sur ses traces...
Le choc fut brutal, sans concession. Il n’avait suffi que d’un seul carreau bien placé pour exploser l’une des jantes arrière de la
Maserati du “
Serbe”. Un tir complexe, mais loin d’être impossible avec l’expérience qu’avait accumulé la
Chasseuse fil des ans, des contrats et des “
vengeances”. Surtout depuis une moto lancée à vive allure, au milieu du trafic routier du soir. Il fallait être précise. Précise pour que personne ne soit toucher, ni par le tir, ni par l’accident qui aller en résulter.
Mais comment prédire les réactions des quidams au volant de leur voiture assistant à la scène ? Une tâche impossible. C’était ce soupçon d’aléatoire qui, même si jamais elle ne pouvait se l’admettre à elle-même, provoquait en elle un petit frisson d’excitation face à l’inattendu.
Ce soupçon d’aléatoire qui poussa la voiture juste à côté d’elle à faire un écart vers elle. Ce soupçon d’aléatoire qui entraina ce petit coup sur la roue arrière de la
Triumph, juste suffisant pour la déséquilibrer.
Alors que le véhicule du “
Serbe” s’envolait en tonneaux hors de l’autoroute... Le moto d’
Huntress terminait sa course sur le flanc le long de rambarde de sécurité, sa pilote projetée et roulant à plusieurs dizaines mètres de là, hors de la circulation...
Le bruit de la circulation était devenu un lointain bourdonnement pour
Huntress. Sa vision, brouillée par le choc de sa chute spectaculaire et l’adrénaline, n’était plus qu’un tunnel, tout droit pointé sur sa cible. Le “
Serbe” était à sa merci. Ce porc s’était débattu, avait combattu, mais il était dans les même dispositions qu’elle. Rien ne pouvait stopper la
Chasseuse quand elle était dans cet état second. Ce savant mélange d’excitation, de rage intense et de concentration. Un cocktail explosif, capable de renverser des montagnes.
L’homme était étalé misérablement au sol, face à elle, plusieurs carreaux plantés dans ses membres, le sang gouttant doucement de ses lèvres. Au-dessus d’eux, la circulation de l’
Interstate continuait son rythme tranquille, seul quelques automobilistes ayant pris le temps de s’arrêter pour constater les dégâts et appeler des secours. Ils ne devaient pas être dessus du spectacle.
La main tremblante sous l’effet de l’adrénaline,
Huntress surplombait sa proie, son arbalète pointée vers la gorge de l’enflure qui lui avait échappé pendant dix ans. Dix ans de traque, spécialement pour l’homme qui lui avait menti ouvertement, droit dans les yeux, en ce Lundi de Pâques 1995. Dix ans à devoir mettre les mains sur les affaires les plus sordides qui soient, dans les endroits les plus sombres de Star-City. Le “
Serbe” n’était qu’une petite main du commando, mais entre
Helena et lui, c’était plus que cela. La liste des griefs s’était allongée au fur et à mesure des années. Elle n’était pas une sainte, mais lui avait franchi les limites bien trop loin, bien trop souvent.
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Tu sais qui je suis ...Une simple affirmation, lourde de sens. Qui n'avait pas entedu parler de la "
Tueuse à l'arblète" ici, à Star-City? Qui n'avait pas entendu parler de
Huntress. Dans le regard du porc à ses pieds,
Helena pouvait voir cette étincelle. Lui, avait compris. L’homme n’eut même pas le temps de répondre. Le doigt de la
Chasseuse avait pressé la détente de son arme. Au loins, les sireines des secours et du SCPD commençaient à se faire entendre.
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Helena! mia Figlia! Attends !Le Père
Asaros se précipitait à la poursuite de la Sicilienne qui claudiquait tant bien que mal vers l’arche d’entré de la cathédrale, son long manteau encore dégoulinant depuis son premier passage sous le déluge qui sévissait encore dehors. Sa “
nièce” s’en aller, sans même se retourner, visiblement déçue de ne pas avoir su trouver le réconfort dans les mots de son confesseur.
Il la rattrapa juste avant qu’elle ne passe le pas de l’arche. Elle n’avait même pas prise la peine d’ouvrir son parapluie, alors que face à elle, un véritable mur d’eau se dressait, dans un fracas rare, entrecoupé d’un étonnement lointain sporadique. La saisissant délicatement par le bras, il l’invita à lui faire face. Celle qu’il avait vu grandir à
Marsala, arraché à sa véritable famille par une folie qui, dans son cas, l'avait poussait dans les bras de Dieu. La pupille de son frère,
Cesare.
-
Helena. Ecoute-moi. Mes mots d’homme d’église ne t’ont peut-être pas soulagé du poids qui pèse son ton âme. Mais peut-être que le Zio que je suis aussi pourrait trouver des mots plus appropriés ? Allons nous assoir un moment. Au moins le temps que la pluie se calme un peu, si Dieu le veut.Antonino. Le frère de Cesare. Elle n’avait même pas réalisé qu’elle venait d’effectuer sa confession face à son “Zio” Antonino. Affichant un triste et timide sourire face à son ainé de quelques années à peine, Helena se détendit un peu, d’une certaine façon soulagée de trouver plus qu’un confesseur discret en ces murs. Son “oncle” avait choisi de rejoindre les ordres quelques années après son arrivée à Marsala, une retraite respectée au sein de la famille Asaros. La vie d’assassin lui était devenue insupportable, comme pour beaucoup d’autre avant lui. C’était cela, ou la mort. Un choix évident pour certains, complexe pour d’autres.
Serrant la main de son oncle, assis à côté d’elle, sur l’un des nombreux bancs à disposition, tous deux contemplaient en silence l’immense nef gothique, en grande partie dans la pénombre. Ce fut le père Antonino qui rompit le silence le premier, se penchant vers l’oreille de sa nièce, d’un ton entre la confidence et le chuchotis.
-
Je suis fière de toi, mia nipote. Aucun serment fait face au divin ne devrait porter la couleur du sang. Je suis heureux que tu l’ais enfin compris. -
Mais j’ai brisé ce serment malgré tout... -
Et alors ? Crois-tu qu’il t’en voudras de cesser de verser un sang inutile en son nom ? Aussi noir puisse-t-il êtres ? Au-delà des murs, le tonnerre résonnait toujours, mais la pluie perdait en intensité... Petit à petit.
Les mots de son “
Oncle” résonnaient beaucoup plus forts en elle que les platitudes de confesseur qu’elle avait pu entendre quelques minutes plus tôt. La douleur de son âme venait enfin de se libérer, arrêtant progressivement de se mêler à celle de son corps, meurtris par sa chute et son combats deux jours plus tôt, à des milliers de kilomètres de là, en bordure d’un autre océan.
Elle l’avait épargné. Le “
Serbe” vivait encore. Le carreau était allé se planter dans le sol, à quelques millimètres de la carotide de ce porc. Un choix délibéré, bien que compliqué. Il était maintenant en réanimation, au
Star-City General, en attente de son procès. Et Dieu seul sait ce que cela lui avait couté de le faire...
Mais
Galante était mort maintenant. Ses mains étaient à jamais tachées de son sang. Mais le voir mourir deux ans plus tôt avait déclencher quelques choses chez elle. Une graine avait été semée dans son esprit, des années plus tôt...
Le Père
Asaros dévisageait sa nièce avec attention, à l’affut de ses réactions. Murée dans le silence, Helena contemplait les voutes, son esprit perdus dans un tourbillon de questions, de remord et de regrets. Une fine larme alla mouiller une de ses joues.
-
Qu’est ce qui t’as fait changer d’avis, mia nipote ? Levant les yeux encore un peu plus hauts, sur les vitraux monumentaux qui la surplombait, elle soupira un instant. Il avait fallu un séjour sur un lit de réanimation elle aussi, il y a des années de cela, pour avoir l’occasion d’entrapercevoir une autre voie que celle qu’elle arpenté jusqu’alors. Et un mot, trouvé à son réveil, plié sur sa table de chevet....
“No more Killings. There is no fate but what we make. Still Fight. Differently” -
Les mots d’un Chevalier Noir … Que j’ai mis beaucoup de temps à comprendre... @"Selina"Hey Babe!
Je suis rentrée à Gotham.
T'as surement une grosse soirée de prévue. On se voit demain? Tu me manques.
Je t'attend, je suis encore à la maison. Tu me manques aussi.
[ENVOYE LE 07/12/2022 - 07PM]
Je dois passer regler quelques affaires avant. On se voit dans une poignée d'heure Babe.
[ENVOYE LE 07/12/2022 - 07PM]
Selina. Ce qu’elle lui manquait. Elles s’étaient séparées à peine quelques jours et déjà, en dehors de ses maux à l’âme, ses pensées n’allaient que pour elle. Pour son sourire. Pour ses cheveux noirs. Le genre de pensées qu’elle n’avait plus eu depuis “
Q”. Ironique, quand on y pense. “
Q” n’était pas le genre de personne à arborer un grand sourire comme
Selina.
Mais elle ne pouvait pas arriver dans son état face à elle. Elle brulait de la rejoindre, mais ses blessures, cette douleur lancinante qui battait le long de ses côtes, ses vêtements détrempés par quelques mètres parcourus sous un parapluie... Rien n’allait.
Se faufilant dans les couloirs des
backstages du
Black Cat,
Helena était bizarrement dans son élément. Jusqu'alors, ce n'était pas vraiment le genre d'établissement qu'elle avait l'habitude de fréquenter, du moins en dehors de ses "missions". Mais depuis qu'elle bossait pour
Miss Kyle...
Selina, c'était devenu comme une deuxième maison pour elle.
Tout le monde la connaissait. Les serveurs, les danseuses, la sécurité. Elle avait pour ainsi dire un accès
VIP Premium. Mais dans son état misérable, elle ne voulait surtout pas que quiconque puisse la voir. La Sicilienne avait sa fierté. Pas toujours bien placée, mais perpétuellement forte.
Montant le petit escalier qui menait à la loge "
propriétaire" où
Selina et elle avaient prit l'habitude de se retirer pour "
décompresser", Helena était tendue. A priori,
Elle n'était pas là ce soir. Mais alors qu'elle passait la clé pour déverrouiller l'accès, elle senti cette petite poussée d'adrénaline, si caractéristique de ses moments d'aléatoire dont elle était si friande en secret.
La loge était vide, et c'était très bien ainsi. Une loge vaste, et plutôt somptueuse à vrais dire. Un bonus très agréable à cette relation qu'elle entretenait avec la propriétaire des lieux. Non pas qu'elle avait besoin de cela. Mais son pragmatisme reprenait souvent le dessus sur ce point. Elle allait pouvoir reprendre visage humain et dans le confort en prime.
Elevant péniblement son chemisier trempé, découvrant ses cotes bleuies par son accident d'il y à deux jours, Helena se dirigea rapidement vers la petite pharmacie de la loge. Une petite armoire, plus que correctement remplie. Loin du genre de matériel habituel pour une loge de boite de nuit. Bandages antihémorragiques, matériel d'urgence de classe militaire, seringue de morphines... Le parfait petit kit de survie de la tueuse à gage, qu'elle avait installé là il y a de cela quelques semaines.
Déballant le tout sur la table base, elle prépara de quoi refaire ses bandages, nettoyer ses blessures, une nouvelle fois... Mais avant cela... Elle devait se doucher...